loser | kit

La curiosité, vilain défaut qui s'est manifesté. La curiosité qu'il aurait dû retenir, qu'il aurait dû éviter. Il se serait épargné quelques tourments supplémentaires – peut-être, qui sait ? Pourtant, l'esprit n'envisage rien de ce qui aurait pu le faire fuir. Non, les songes sont ailleurs, trop bien envolés. Posés sur une toute autre sphère que celle qu'il craignait d'avoir encore à arpenter. Et la raison voudrait remercier la liqueur ingurgitée, ces effluves empoisonnées de cet alcool qu'il avait promis de ne plus réellement toucher. Oh, elles sont trop nombreuses encore les promesses qu'il pourrait avoir à briser. Une liste longue comme celle des faux pas déjà commis – mais la conscience ne s'y arrête pas. Détournée qu'elle est, posée sur cette présence qui se tient à ses côtés. Curieux, encore, malgré tout ce qu'il pourrait avoir à regretter. Curieux, à ne même plus appréhender les mots qui pourraient lui être délaissé. Il n'y a que cette mise en garde qu'il a donné – rien que cette indication pour s'épargner un nouveau bannissement momentané de ces lieux autrefois trop fréquentés. « Oh that’s a shame, I wanna see that. I know I’m no pretty girl but I can look like one if you want me to. » Là, le rire. Tintement des cordes vocales qui s'épousent pour laisser ce timbre s'exprimer. Il a détourné les prunelles, pourtant. Il a laissé ses orbes se perdre ailleurs que sur cette silhouette qu'il craint d'avoir à contempler. Non, ce n'est pas cet allié qui l'effraie, ce sont les songes qui pourraient désormais se manifester – cette pauvre imagination qui s'amuse à dessiner tout ce qui peut être supposé. Il ne prendra pas ce risque, pas tant que son poison ne rappellera pas ses effets. L'ignorance, l'oubli – il pourrait se mettre à les prier mais s'en abstient, usant de ces secondes qui s'écoulent pour se concentrer sur le jeu plutôt que sur ces paroles osées. Non, il tient son silence, Phoenix. Les orbes dépareillées posées sur le jeu qu'il a cassé. L'attention en suspens puisqu'il joue, le blond. Il s'y risque, parvient à rattraper de peu ce point qu'il s'était approprié. Il jure, sans en faire davantage. Loin d'être un mauvais joueur, plutôt heureux de pouvoir au moins participer. Parce que ça éloigne les sombres souvenirs qu'il tient encore à chasser. Rien que pour ce soir, rien que pour cette fois ; qu'on l'ampute de cette improbable réalité. Qu'on lui offre un soupçon de liberté avant que les doutes et les regrets n'aient à trop s'éveiller. « Fine, if you don’t want to dance… If I win, we’ll go to a karaoke bar and you have to sing for me! I choose the song. » Interpellé, l'attention récupérée par celui qui s'est mis à lui parler. Là, il essaie d'analyser ce qui vient de lui être confié. L'appréhension, désormais. L'appréhension des paroles qu'il pourrait avoir à réciter plus qu'à chanter – plutôt fier du peu de représentations qu'il a déjà pu tenter. « What ? » Mais rien, rien n'est répété. Et un tour de plus est offert à celui qui semble déterminé à gagner. « C'mon ! » Parce qu'à trop se laisser distraire, il en oublie l'enjeu qu'ils s'étaient donnés. Et la chance tourne ; de peu, à peine. Son tour qui vient, la voix de Kit qui revient. « Do you know what you’ll ask me if you win ? »

Un haussement d'épaules discret, à peine marqué – probablement invisible. Il s'est avancé, Phoenix. Il s'est risqué jusqu'à cette table où tout est en train de s'imposer. Il essaie de forcer l'esprit à s'y concentrer, sur les possibilités qu'il pourrait énoncé comme ce jeu qu'il ne doit pas laisser lui échapper. Il guette, il fait mine de calculer. Coup de poker en vérité, mystérieux petit oiseau qui se terre dans son mutisme pour parfaire l'image de celui qui sait ce qu'il fait. Pas du tout, leurre savamment levé, piètrement représenté. Parce qu'il manque encore, l'idiot – concentré qu'il était à trouver une idée originale plus qu'à savoir comment s'y prendre pour au moins savoir viser. « Damnit, I don't know yet. » Les premières syllabes pour ce coup manqué, le reste à l'attention de sa compagnie improvisée. Il s'est reculé, laissant l'espace approprié pour que Kit puisse une nouvelle fois prendre cette avance qu'il pensait pouvoir maintenir sur quelques tours ; bien qu'elle ne soit pas décidée à prospérer. L'avait-il dit qu'il jouait comme un manche ? Sans mauvais jeu de mot évidemment mais l'idée reste la même – aussi misérable que risible quand on peut y songer. « Oh ! No ! I know ! I'll get you a t-shirt with my face on it and a text : Phoenix knows better than me how to win. You'll have to wear it for a week, or two. depend on the gap between our points. What do you think about that ? You better have to win... A t-shirt with my face, it's suck. » Le verre relevé, la gorgée aussitôt avalée. Le sourire qui n'a pas décroît, qui s'est même accentué. Parce qu'il en devient déterminé lui aussi à vouloir gagner, rien que pour ce plaisir à le voir se balader avec ses traits bien affichés. Une petite victoire qu'il irait savourer, des photos qu'il ferait très certainement tous les jours rien que pour pouvoir entretenir la finalité de ce gage qu'il s'est mis à partager. « The destiny of those next weeks is in yours hand. » Un clin d’œil à son tour, pour ne pas déroger à cette habitude qui semble s'être installée. Taquin et familier, un instant d'aisance qu'il craint de perdre dès lors que les effets de l'alcool se seront dissipés. Mais la nuit est encore jeune dont ils ont à profiter. La nuit est encore longue à passer – et des idées aussi nulles que celles-ci, il en possède une infinité.      

Le rire qui s'élève, ce rire qui énonce bien des choses – sans qu'il ne soit pourtant à même de les énumérer. Il tique, les yeux qui se froncent dans la foulée. Phoenix attentif à ce qu'il pourrait avoir loupé, les épaules saisies quand le blond parvient enfin à s'approcher. « Sorry… Sorry it’s just… I was not prepared for you to find my one weakness. » Curieux désormais – plus qu'il n'aurait pu l'être dans un premier temps. C'est qu'il en devient fascinant, celui qui parvient à le faire sortir de ses tourments. Il y a bien des questions à poser mais rien, aucune de celles-ci ne brave la barrière des lèvres courbées. Parce qu'ils ne se connaissent pas plus que ça, ces deux-là. Ils ne se sont qu'à peine croisés, à peu près parler. Il lui avait semblé si léger, c'est l'idée. Elle est là, la première raison de sa venue vers lui quand son monde semblait s'être mis à trop trembler. Curieux, encore – toujours. Curieux puisque tout est ignoré de ces profondeurs qui sont encore bien dissimulées. « But you know what… I’m such a Fashion genius, I’m sure… I’ll make it work somehow… People will wanna wear the same shirt by the end of that dare. » C'est à son tour d'en rigoler, à son tour de ne pas masquer cette hilarité. Intrigué par cette assurance qu'il vient de lui confier. Cette supposition parvient à tout raviver, ce côté trop gosse qu'on peut parfois lui reprocher. Derrière les pensées s'est matérialisée l'image d'un monde où tous pourraient avoir à porter ses traits suite à ce défi improbable mais encore honoré. Et pourtant, l'attention est rendue au jeu qu'ils ont encore à terminer. Là, les prunelles dépareillées qui s'attardent sur les mouvements, sur cette dextérité que celui-ci parvient à maîtriser. Le voilà à jurer, le voilà à maudire ce foutu hasard puisqu'il parvient encore à garder cette avance qu'il s'était approprié. Non, définitivement, quelqu'un devait lui en vouloir là-haut ; et si les songes n'étaient pas ainsi embrumés, il supposerait très certainement les spectres qui persistent parfois à le hanter. Ceux qui viennent nécrosés les quelques rêves auxquels il pourrait avoir à s'adonner. Qu'importe, qu'importe puisque les brumes se sont posées. Qu'importe puisque les effluves alcoolisées apaisent les quelques douleurs trop péniblement portées. Répit qui s'accentue un peu plus puisque le deuxième rate ; opportunité laissée de pouvoir récupérer cet élan que celui-là s'était approprié. « Right Firebird go ahead, you might wanna try to catch up with me you know. » Le défi, le défi qui parvient à prendre un peu plus d'ampleur. Il a cette volonté de gagner, Phoenix, rien que pour avoir à apprécier ce gage qu'il aura à pleinement lui énoncer. Il soupire un peu, encaisse même le maigre coup d'épaule dans un sourire bien appuyé. Trop heureux qu'il est, l'abruti, de pouvoir enfin correctement respirer puisque libéré des chaînes d'une odieuse lucidité. Rude bataille qu'ils mènent, ces deux-là. Légère petite guerre qui se conclura très certainement par un croisement de ces deux paires de bras.

Il a respiré à grandes bouffées, le tatoué. Il s'est redressé, droiture qu'il feint de pouvoir tenir quand pourtant, son petit monde s'est mis à tanguer. L'ignorance qu'il essaie d'empoigner pour tenir cette improbable prestance mal jouée. Qu'importe, qu'importe le ridicule puisque la conscience s'est ensuquée. La canne récupérée, la place qu'il va prendre avant de s'offrir un semblant de pause, son verre aussitôt récupéré. La lampée du courage qu'ils appelleraient ça, à n'en pas douter. La force qu'il cherche dans ce breuvage malsain qui corrompt jusqu'aux songes les plus sérieux, qui ne devraient pas être défaits. Mais ne sont-ils pas ici pour justement tout éloigner des tourments qui auraient pu avoir à régner ? Bien-sûr que si. « You know, I'm quite sure I can win this game. » Oh, il essaie de s'en persuader. Il fait au mieux, Phoenix, pour s'en convaincre avec toute la volonté qu'il soit à même de rassembler. « I'm gonna win it. 'cause, man, I can't wait to see you with that shit for a entire week. » Là, il a levé la canne – chevalier qu'il s'improvise et qui énonce ces paroles comme un serment qu'il ne pourra bafoué. Prêt à défier toutes les lois qu'il s'était instauré pour parfaire ce nouveau rôle si ridiculement porté. Là, une prière mal répétée, les mots qui s'emmêlent avant qu'il ne s'affaire à jouer. La concentration mise à rude épreuve mais la précision qu'il essaie de louer. Pour une première réussite, le corps qui lâche, le buste qui s'affale sur la table là où rien ne traîne. Il soupire, un rire qui s'étiole d'entre les lèvres pour relâcher cette fausse pression qu'il s'était attribué. « Ok, this is the time where I thanks... myself for that wonderful move I just did. Yeah, thanks, thanks... » Il feint la révérence, les merci quand les mains se joignent pour un public inexistant. Légère pause qu'il s'autorise avant d'y revenir, avant que la chance n'ait à s'éloigner – mais elle s'est déjà envolée. « Fuck ! » Raté. Raté ce coup qui aurait pu lui offrir une égalité. Raté puisqu'il s'éloigne, puisqu'il s'en remet au poison qu'il aurait dû ignorer. Les prunelles qui s'attardent sur cette compagnie qui a accepté de se tenir à ses côtés. « Please, not Britney. » Les yeux doux qu'il essaie de faire valoir – petite saloperie qui mise sur l'originalité des couleurs de ce regard pour avoir gain de cause sur ce qu'il devrait avoir à honorer.       

Veilleur dont les prunelles lorgnent la table. Là, il a essayé. Il a fait de mon mieux pour susciter un semblant de pitié chez celui qui pourrait bien s'enrôler bourreau pour la fin de sa soirée. Non, il n'y tient pas forcément à devoir user de voix pour quelques paroles ignobles qu'il ne connaît pas – et qu'il n'a pas envie de connaître. Mais le jeu, le jeu qu'il tient à honorer. Le jeu qu'il suivra puisqu'il s'y est engagé. Attentif, l'oiseau de feu trop bien embrasé. Celui se sort des ombres où il cherchait à s'enliser. Les verres vidés qui aident la conscience à s'apaiser, à se défaire des chaînes auxquelles elle était destinée. Plus serein, oui – les prunelles qui guettent encore cette nouvelle compagnie les mouvements qu'il se doit désormais d'affirmer. Oh, il essaie d'ignorer ce qui pourrait s'élever. Il essaie de passer au-delà de ce rappel qu'il s'amuse à lui faire ressasser. « Remember, it goes something like… “Oh baby baby… how was I suppose to know…” » Oubliées, ces syllabes qui peinent à s'ancrer dans la mémoire. Oubliées pour parfaire l'attention sur ce coup manqué. Oh, il jubile presque, l'animal qui tangue en se redressant, en allant pour approcher. Il jubile de cette victoire qu'il croit pouvoir s'approprier. « Wow, that really sucked. » Il confirme, s'improvise mauvais critique maintenant que les bras se sont croisés. Non sans ce sourire qui s'installe, qui s'accentue sur les pulpeuses imbibées. « Looks like… You get another shot. Actually, we all do. » Les sourcils qui se froncent, l'attention rapidement récupérée par ces mouvements levés, cet appel à la décadence qui résonne pour parfaire cette douce aliénation retrouvée. Il acquiesce, désigne son partenaire de la main pour sous-entendre qu'il fait bien. « You'll need it. » Taquin, encore. Toujours. Taquin puisqu'il croit pouvoir y mettre du cœur quand seule la chance est désormais à prier. Lui qui s'affaire, qui s'avance – qui tente de pouvoir se stabiliser contre le bord de la table où tout est en train de se resserrer. Un coup réussi, les paupières qui se ferment comme pour amplifier ce soupire rassuré qui brave les lèvres enfin descellées. « How is it that I can be that lucky tonight, fuck... » Un murmure, la voix qui porte tout de même. Il se met à en rire, Phoenix. Timbre qui porte, qui s'élève un peu plus tandis qu'il s'en remet à ce qu'il peut encore s'approprier. Un souffle, encore. Une approche lente, délicate pour parfaire ce jeu qu'il croit pouvoir dominer. Avec succès puisque la deuxième passe qu'il n'espérait même pas en vérité. La tête qui bascule en arrière, les bras qui se sont levés. Là, il remercie l'enfoiré d'en haut pour lequel aucune prière n'est jamais laissée. « You should start thinking about how you're gonna deal with my face for the next seven days. » Trop à l'aise, trop confiant. Trop, d'un coup. Trop, puisqu'il manque cette nouvelle opportunité qui lui était laissée. Là, il en soupire encore. Là, il laisse son buste reposé sur la table, le front qui heurte tout cette dernière – quoi que maigrement, seulement dans un geste lassé des maigres espoirs qu'il s'était pleinement approprié. « Fucking hell... go ahead. » Si proche et à la fois si loin du but. Trois, il ne lui en reste que trois à faire disparaître pour gagner cette partie entamée. Trois ; et il voudrait se persuader de sa chance tout en sachant qu'elle ne suffira plus désormais.        

Les murmures sont silencieux qu'il garde pour lui. Quelques prières qu'il persiste à lever, non sans en provoquer son sourire trop bien illuminé. S'en mêle cette nouvelle émotion, cette adrénaline certaine qui se distille jusqu'aux cœurs des veines imbibées. L'alcool embrume les songes, les raisons, les tourments – la totalité de ce qui forçait l'âme à se questionner. Qu'importe, qu'importe puisque l'attention est donnée à cette partie devenue serrée, à cet avantage qu'il vient de récupérer. Silencieux et contemplatif alors. Parce qu'il s'anime, cet allié, cet opposé pour encore quelques instants. Les phalanges réclament la fraîcheur d'un verre tout juste amené. Les lèvres s'y perdent, la trachée s'en abreuve pour taire les brûlures qui pourraient avoir à se manifester. Et le regard bicolore devient curieux sur ce mouvement qui s'appose – pour le faire manquer. Il a fermé les yeux, la courbure des lèvres un peu plus appuyée. Il jubile, Phoenix, croit pouvoir échapper aux affreuses paroles qu'on veut lui faire chanter. Il croit pouvoir être le vainqueur, il se mettrait presque à le fantasmer pour peu qu'une estrade ne soit pas à rallier. Et la question qui force le rire. Cette interrogation soulevée quant à ce qu'il lui avait promis, le choix d'une photo réclamée. Il peine les lèvres, la moue tracassée. Il feint ce dilemme qu'il ne possède même pas puisqu'il lui laissera le choix pour peu qu'il accepte de réellement s'y plier. « I'm not sure yet. I need to think about it... » Un haussement d'épaules avant d'abandonner ce qu'il tenait, avant de venir prendre la place du blond pour pouvoir jouer. Amateur qui croit pouvoir revêtir le manteau du professionnel à la manière dont il s'est penché. Presque couché sur le bord de la table pour mieux tout appréhender. Il est ridicule – mais tant que ça parvient à les faire marrer. « So ! » Et il s'est redressé, les phalanges qu'il s'amuse à faire craquer, la nuque aussi dans la foulée. Et l'élan qu'il s'approprie pour jouer. Toute sa chance qu'il invoque pour pouvoir réussir ce qu'il vient tenter. Un coup maladroit, peu convaincant... qui lui offre tout de même une nouvelle avance sur cet adversaire contemplé. Là, il toise. Il guette. En apnée, prêt à rire sans encore l'oser. L'éclat qui vient, qui s'installe – qui résonne. L'éclat, le tatoué plié sur cette table qu'il essaie de ne pas déranger. « Your face... I will NEVER forget it, I swear... » Et il se redresse, et il tente le tout pour le tout. Encore secoué des rires qu'il retient, un nouveau coup qui parvient à réussir, sa chance qui s'amuse à l'embrasser. « OH MY GOD ! » Il gueule, sans réellement parvenir à retenir la voix qui s'est levée. Il gueule, lui trop fier de cette audacieuse chance possédée. Mais il sait, il sait que les voiles virevoltent trop aisément sur ce qu'on peut ou non attribuer. Là, la preuve. La dernière à faire disparaître qu'il manque avant que les paupières n'aient à se fermer. « Fuuuuuck ! » Taz des Looney Tunes. Taz qui croit tout saccager avant que le dos ne s'appose simplement contre le mur, son verre retrouvé. « I can't believe I failed on this one. » C'était impensable mais en même temps trop prévisible – au fond de lui il le savait. Il  y a ces étincelles qui vont et viennent, qui imposent leur règne avant de brièvement s'étioler. Il aurait dû attendre, s'offrir rien qu'un instant, rien qu'une gorgée de ce qui fut commandé avant de provoquer cet élan qu'on lui avait donné. « The secret is to believe in it. » Le sourire marqué qu'il essaie de retenir, les prunelles qui s'attardent ailleurs comme pour éviter les possibles éclairs que cet autre aurait à lui envoyer.         

Concentré qu'il est, Phoenix. Accaparé par cette partie qu'il ne pensait pas aussi stimulante avant que tous ces liquides n'aient à l'accentuer. Elles sont nombreuses, ces suppositions levées. Elles viennent, vont, reviennent enfin pour lui rappeler sa part du marché. Il croit d'ores et déjà les entendre, ces paroles qu'il ne tient pas à prononcer. Un tique, une moue un peu dégoûtée qu'il essaie de refréner. L'attention posée sur ce jeu qui continue, sur ces dernières chances que tous deux possèdent. Si près, si près du but finalement – l'envie de parfaire ce jeu pour s'offrir un semblant de victoire. La dernière qui résidera entre les sept jours qui suivront cette étrange soirée. À trop s'y perdre, encore. À trop rêvasser jusqu'à ces quelques mouvements qui parviennent à l'y rappeler. Concentré qu'il est, encore, toujours. Concentré sur les essais de celui qu'il guette, qu'il voudrait pouvoir déranger mais le fair-play qui intervient, bataille honorable qu'il ne tient pas à bafouer. Les paris sont lancés qu'il n'a pas à entraver. Patient alors, les prunelles dépareillées qui s'abandonnent sur la table, sur ces quelques sphères qui restent et qui attendent de pouvoir être bousculées. Il laisse faire, les paupières qui claquent quand le premier coup est un succès. Un juron qui s'élève quand la deuxième disparaît également. La chance, la chance qui virevolte entre les deux âmes. La chance qui s'amuse à faire palpiter les cœurs – et les lèvres s'assèchent trop rapidement, la trachée réclame sa brûlure, ce poison auquel elle doit se réhabituer. Noyer son envie de gagner dans l'alcool, en voilà une bonne idée. La gorge à peine avaler que le sérieux revient, que la hauteur est retrouvée. « Nice move, captain. » Une minuscule révérence qu'il s'avance à faire valoir, encore. Rien qu'une pour rejoindre sa place devant le tapis vert que leurs coups pourraient bien abîmer. Mais les tremblements, ce rire qui manque de lui revenir et qui chasse la glorieuse opportunité qu'il possédait de mettre un terme à ce suspens bien installé. Là, dépité. Là, le front qui s'appose contre la mousse quand le souffle est expiré. Il jure, Phoenix – il jure en même temps que les plaintes dégoûtées de ceux qui se sont mis à les observer. Animation de la soirée qu'ils sont devenus dans leur perdition, dans cette légère démence si bien empoignée. Non, ça lui plait. Bien-sûr qu'il ne peut qu'en profiter, lui qui se redresse en haussant les bras devant celles qui se tenaient derrière lui. « Sorry ladies, knowing you were here, looking my ass, it disturbed me a bit. » Un clin d'œil dans la foulée, l'attention rendue à cette compagnie qui a désormais l'occasion de tout remporter. « You're the lucky one now... It's your chance. » Fair-play, encore, toujours. Bon perdant en vérité, ça a du positif dans un jeu comme celui-ci en sachant ce qu'ils ont échangé, leur parole pour ces gages à tenir pour celui qui aurait à échouer.          

Attentif, de moitié. Attentif pour le jeu qui continue, qui semble être à même de s'éterniser – les derniers essais ratés. Oh, il a blâmé les demoiselles qui contemplent le jeu pour ne pas admettre qu'il n'est pas ce professionnel que l'esprit s'est mis à fantasmer. Pour intégrer ces curieux qui se sont risqués autour de cette table improbable où rien n'est à retenir, où tout est à moquer. Le rictus reste, les prunelles s'abaissent tout de même quand ces traits s'attardent sur les siens. Non, l'alcool entre trop en compte pour qu'elles puissent s'accaparer son attention. Pas maintenant, pas ici – il a une partie à gagner, une partie à mener. Et comme il y revient, ce nouvel allié, il se met à patienter, à trépigner. Il ne sait plus, Phoenix, s'il tient à le voir perdre ou s'il est tenté de le laisser gagner. Les deux possibilités envisagées, cette soirée qui en aucun cas ne saurait être gâché. Il s'était attendu à tout quand le Paradize était rallié mais pas à ça, pas à ce dénouement qui tarde pourtant à s'ancrer. Elle est pincée, la lèvre, mordue entre les dents puisqu'il joue... et rate, une fois de plus. Il jure, à en gueuler. Il jure, avant que ce rire n'ait à résonner. Les bras se sont levés – lui qui s'imagine désormais grand gagnant de cette pathétique partie orchestrée. Pourtant la meilleure, à n'en plus douter. Il ne compte plus les mois qui se sont écoulés depuis la dernière fois où il s'était ainsi amusé. Et si lui semble pouvoir davantage s'élever, le blond s'effondre sous le constat de cet échec en lequel il ne croyait pas. « Fine ! Go ahead. Destroy me… my reputation… my fashion… » Une moue désolée qu'il affiche, une main compatissante qu'il appose sur l'épaule avant de s'avancer – pour la dernière fois, l'espère-t-il rien que pour pouvoir gueuler cette victoire pour laquelle ils ont bataillé. Le sérieux, c'est ce qu'il essaie d'imiter. Le sérieux, c'est ce qu'il essaie de retrouver maintenant que la table est ralliée, maintenant que le jeu peut être contemplé. Là, il feint les calculs silencieux pour parvenir à ses fins. Il feint cette perfection dans les gestes qu'il s'apprête à jouer, ceux-là pourtant décousus, à peine tenus. Mais les prières saccadées de quelques rires sont entendues, exaucées. Son dernier point disparaît dans l'une des ouvertures de la table avant qu'il ne se mette à gueuler. Le surjeu, une habitude qu'il n'a pas abandonné. Le surjeu maintenant que les dés sont jetés, maintenant que ses traits auront à parsemer les tissus de cet autre pendant une semaine, et il saura y veiller. « You ! » L'index qu'il lève pour désigner cet ami et adversaire. Ami ? Oui, il est déjà prêt à l'appeler ainsi. Parce qu'il n'a pas idée, Kit, de tout ce qu'il a su éveiller en cette carcasse fracassée. Cette ancienne joie ravivée, cette impression de respirer malgré la trachée obstruée de cette honte qui s'y était accumulée. Il l'a sauvé, pour quelques heures, pour toute une nuit en vérité. « You will hate me by the end of the next week. » Il a lâché ce qu'il tenait, il s'est avancé pour venir le confronter. Les bras se sont écartés pour offrir cette étreinte méritée.           

L'instant qu'il tient à savourer, cette aisance dans les gestes – cette liberté retrouvée. Ainsi, les poumons se sont gonflés, l'air est retrouvé qu'il parvient à pleinement inspirer. Il vit encore, l'oiseau décharné. Il s'élève encore parmi ces âmes pleines de vitalité ; conscient qu'il pourrait en faire partir, celui-là, s'il parvenait à sortir la tête des eaux troubles qui l'ont submergé. Lui qui s'y enfonce, dans cette étreinte acceptée. Le sourire trop bien installé sur les pulpeuses puisque tout lui revient de ce qu'il avait oublié. Cette grandiose félicité. Cette manière de vivre telle qu'il l'avait fait, là, avant que les ténèbres n'aient à s'imposer. Envolées, ces dernières. Destituées du trône qu'elles s'étaient accordées et qu'il ne tient pas à leur rendre – il saura batailler. Rien qu'en l'honneur de ce temps que Kit lui a accordé. « Fine, congratulations Firebird… I will honor my word and wear your face with pride. » Ce rire qu'il ne peut réprimer, qui s'ancre dans l'éternel de cette étrange soirée. La liberté rendue tout de même, cette distance réinstaurée. Il contemple les alentours, essaie de ne pas emmêler les pas qui ont à se faire pour ranger le merdier qu'ils ont accumulé ; en vain, il abandonne, d'autres y parviendront bien mieux que lui puisque l'air sous les ailes ne l'amène qu'à tanguer. « Let’s get another drink to celebrate ! » L'index qu'il a levé, les paroles qu'il ne peut réfuter. La meilleure idée prononcée, comme une prière à cette déchéance qu'il persiste trop souvent à vouloir embrasser. Corrompu, Phoenix, jusqu'aux limbes où ces effluves aiment à se distiller. Les pas qu'il a déjà entrepris jusqu'au comptoir où, de justesse, il se rattrape. L'air sérieux, la prestance qu'il essaie de faire valoir misérablement maintenant qu'il se retrouve devant celui qui attend les commandes supposées. « Something, I don't care. I won, he's gonna pay. » Kit désigné, Kit qu'il attrape dans la foulée pour l'inviter jusqu'à ses côtés. Le souffle qu'il essaie de réguler, ces hauts le cœur qu'il s'empresse de réprimer. Non, il n'en a pas fini pour ce soir – l'ivresse lui avait trop manqué. Et pourtant, le corps réclame cette pause, ce répit bien mérité. Il en a trop vécu, trop vu, trop porter pour allier l'alcool et cette fatigue trop bien installée. « Jeez, I don't even remember where I left my car... » Les traits qui viennent s'enfouir dans les bras serrés. La conscience en berne puisque trop embrumée – évincée de son éveil par ces troubles sur les prunelles qui se sont pleinement dilatées. Et s'il se relève, ce n'est que pour le tintement des verres sur le comptoir où il continue de s'enfoncer. « Drink ! » Sésame qu'il lève de ses deux mains – comme une relique improbable qu'on lui aurait concédé. « Hope you remember where you live at least ? » Pertinente, la question, même malgré la manière dont les syllabes sont mâchées. Pertinente qui le force à essayer de se souvenir où s'effondrer quand celui-là rendra les armes qu'il n'est plus à même de porter.            

Les sens anémiés, l'impression que le sol se dérobe sous ses pieds. Oh, elle lui avait manqué cette impression ; vieille compagne d'un temps qui devait être révolu mais auquel, sans hésiter, il est revenu. La courbe tient encore les lèvres malgré la brève inquiétude pour cette voiture qu'il a évoqué. Les pensées vont et viennent en vérité sans qu'il ne parvienne à pleinement s'y concentrer. Non, en l'instant, les prunelles n'ont d'étincelles que pour ce verre qui lui a été servi ; poison réattribué à la carcasse qui aurait dû au mieux s'en sevrer. Rattrapé à l'instant, enfin. Il n'a pas écouté, n'a presque rien entendu hormis les battements conquis d'un cœur qui croit pouvoir se regonfler. L'oreille presque attentive qu'il rend à cette compagnie, aux paroles qui lui sont confiées. Il se souvient. Il croit. Un haussement d'épaules alors ; rien que cela pour parfaire cette hésitation qu'ils sont deux à partager. Il ne sait plus, Phoenix, tout est emmêlé. Il y a le passé qui s'immisce, qui s’intercale avec ce présent qui s'amusait à le torturer. Patient, pourtant, à tenir cette présence comme unique repère pour les orbes dépareillées. Il essaie d'y rester accroché, il fait au mieux pour ne pas de nouveau s'égarer en mille et une idées éparpillées. « Oh well I’ll just get a cab to a hotel and sleep there. » Il a levé l'index, admirant cette supposition de génie qu'il vient de prononcer. Lui ? Non, il n'y aurait pas pensé. Phoenix se serait probablement effondrer à l'arrière de sa voiture en attendant que l'aube ne vienne le tirer des bras osseux d'un Morphée à peine embrassé. « Oh wait no I have my address on my phone ! » Les traits qui se teintent de cette surprise – la moue aussi soulagée que celle de son compère maintenant qu'ils ne peuvent affirmer ne pas être égarés. « What about you Firebird, d’you know where you live ? » Puis vient la colle, les mots qui manquent quand la raison voudrait pouvoir clamer que oui, il sait – mais l'esprit nage encore en eaux troubles et profondes. Un bref mouvement d'épaules, les lèvres pincées avant qu'un rire ne lui échappe, avant que cet éclat n'ait à se rappeler. « I know how it's inside but, to be honest with you, right here, right now... I don't remember how to go there. » Et qu'importe, qu'importe puisque sa soirée n'est pas terminée. Qu'importe puisqu'il refuse d'avoir à braver cette entrée dans cet état qu'il s'est lui-même infligé. « Doesn't matter, I can sleep in my car. Won't be difficult to find it anyway. Et il s'est redressé quand le timbre s'est levé, fier qu'il essaie d'être quand, pourtant, tout lui semble en train de tanguer. Beautiful and expensive, I can't forget it. » Et il acquiesce à ses propres dires, l'abruti. Trop bien entamé déjà, trop bien enfoncé dans cette superbe léthargie qui apaise les sens et les tourments cette fois réellement assommés. « Plus, hotel was a good idea. » Un nouveau mouvement de tête, déterminé à pouvoir l'affirmer – au moins, personne ne serait à même de pouvoir le trouver là-bas. On le laisserait dans sa démence, dans cette errance momentanée. On le laisserait réfléchir, pour sûr, et ce sans trop l'oppresser.