Il n’y a que les dettes que l’on peut payer qui sont ennuyeuses

Je jette un rapide coup d’œil à ma montre avant de lever les yeux vers le ciel toujours couvert. Bordel, je ne suis vraiment pas friand de cette période de l'année, et il faut que ce soit pile à ce moment qu'on m'accorde ma liberté conditionnelle ! Bon, je ne vais pas me plaindre de ça, je préfère encore passer quelques semaines à me coltiner le froid et la pluie plutôt que de prolonger mon séjour derrière les barreaux. Malgré tout, ça me fait un peu bizarre de ne pas avoir en permanence quelqu'un pour me surveiller, que ce soit un maton ou un autre prisonnier, et je me rends compte qu'en seulement cinq ans, j'en ai déjà pas mal raté. Je n'ose pas imaginer ce que ça fait quand on se retrouve la moitié d'une vie derrière les barreaux.

Sauf que je m'en fiche un peu, je n'ai pas l'intention d'y retourner, alors j'oublie bien vite ces questionnements philosophiques et je laisse mon bras retomber le long de mon corps avant de glisser machinalement mes mains dans mes poches, non sans avoir replacé correctement ma casquette sur ma tête. Elle m'avait manqué, elle ! Il ne se passe pas une journée sans que j'en porte une, même en extérieur ou par temps couvert. Il y a probablement une explication psychologique à ça, mais là aussi je m'en fiche pas mal, parce que je me moque bien de ma santé mentale.

Mains dans les poches, je reprends ma marche en direction d'une maison du quartier. C'est la première fois que j'y mets les pieds, et c'est aussi la première fois que je vais rencontrer le type qui y vit. Au fond, je m'en tamponne complètement, parce que je n'ai pas l'intention d'en faire mon pote. Je dois juste faire un truc que j'ai promis, et il se trouve que sous mes airs de je-m’en-foutiste, je suis un homme de parole. Dans ma poche droite, je sens l'objet de ma visite et je le triture malgré moi, essayant toujours de me persuader que c'est une simple course et qu'elle n'a pas la moindre importance à mes yeux. Pourtant, je sais que c'est tout le contraire ! Sauf que je suis passé maître dans l'art de me voiler la face, surtout quand c'est pour des trucs sentimentaux tous nuls.

Ma progression se fait plus rapide et j'arrive bientôt au numéro qui m'intéresse. Je regrette toujours d'avoir laissé ma moto au garage, mais je préfère éviter de l'emmener sur le territoire des Crows aussitôt après ma sortie de prison. J'aperçois un garage ouvert à côté de la baraque, et j'entends du bruit à l'intérieur. Sans me faire prier et sans me soucier du fait que je pénètre sur une propriété privée, je me dirige vers ledit garage, mains toujours dans les poches, puis je lance un premier appel à la cantonade, suffisamment fort pour que le gars m'entende avec le bruit qu'il fait.

« Lindley ? »

Je connais aussi le prénom du gars en question, mais je n'ai pas envie de l'utiliser pour le moment. Je commence à me sentir bizarrement mal à l'aise et je déteste ça. Le vieux me fait chier avec ses histoires de merde, j'aurais mieux fait de l'envoyer chier et de lui dire de se trouver un autre abruti pour faire ses courses. Mais bon, j'ai promis et je ne peux pas changer le passé. L'impatience me gagne soudain.

« Lindley ?! Je répète d'un ton un peu plus impatient. »

Les bruits s'arrêtent enfin, et j'entends quelqu'un approcher. Le vieux m'a sommairement décrit le type : un grand barbu avec des tatouages, la quarantaine bien entamée, beau gosse, le genre qui plaît aux femmes. Mais qu'est-ce que j'en sais moi ? Je suis pas recruteur pour un magasin de mode, j'en sais rien si ce mec est beau ou plaît aux femmes. Moi je lui trouve plutôt la gueule d'un ex-taulard, et si c'est bien le fameux Lindley, c'est le cas. Je soupire, mains toujours glissées dans mes poches, campé sur mes jambes comme si j'allais prendre racine. J'ai récupéré les fringues que j'ai pu à ma sortie de prison, et ça se résume à un vieux jean, un vieux sweat-shirt et mon éternel cuir, je ne paye pas de mine. Heureusement, je ne suis pas venu ici pour postuler pour devenir mannequin, alors je m'en fiche bien de ce qu'il va penser de moi !
J'attends de vérifier qu'il n'est pas armé, puis je reprends la parole tout en sortant doucement et précautionneusement ma main de ma poche droite. Je n'ai pas envie de me faire plomber en lui faisant croire que je vais sortir un flingue.

« Y'a quelqu'un qui m'a demandé d'te ramener un truc. Je plie le coude, levant l'objet à hauteur de mon visage. C'est une bague des Black Crows, une qu'il devrait reconnaître. À ce qu'il paraît, tu sais c'que c'est. »

Et je ne compte pas la lui filer avant qu'il me dise de qui elle vient. Le vieux m'a dit que Lindley saurait ce que c'est et que je ne devais lui confier qu'une fois que je serais sûr que c'était bien lui. J'espère vraiment que le vioc n'a pas surestimé l'importance qu'il avait pour ce gars, et que ce type ne l'a pas oublié depuis. Ça me ferait chier d'être venu ici pour des prunes !

@James Lindley

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Depuis combien de temps, James se retrouvait seul chez lui ? Beaucoup trop longtemps à son goût. Riley était partie, il n’y avait pas si longtemps que ça, et lui avait confié son raton laveur. Ce fameux Junior. Et s’il n’avait rien dit au début, il n’y avait aucun doute sur le fait que cette gamine lui manquait bien plus qu’il n’aurait pu l’imaginer. Mais au moins, ils continuaient à parler, malgré la distance. Loin des yeux, près du cœur, comme on dit. Et rien que cette pensée le fit sourire. S’il n’avait jamais réellement compris à l’époque, maintenant, c’était une véritable évidence. Enfin, le ténébreux avait décidé de bosser sur sa voiture, depuis le temps, il était grand temps qu’il arrive à la démarrer cette pétasse. Mais il savait y faire, le brun, c’était comme les femmes, si on les traitait bien, elles nous le rendaient. Est-ce que ça valait également pour les hommes ? Allez savoir, en tout cas, il faisait de son mieux quand ça concernait Charlie.

Lindley ne s’attendait pas à de la visite aujourd’hui, assez pour qu’il ne fasse même pas attention à ce qui se passait autour de lui. Junior était sage et jouait dans un coin avec une boite de conserve vide, Lucifer était sûr sa couverture, en grignotant un os. Et le bougre avait la tête dans le moteur. On l’appelait une fois. Il ignorait. Ne reconnaissant pas cette voix de crécelle. Puis une seconde fois. Et James n’avait visiblement pas le choix de se redresser pour laisser échapper un soupir d’entre ses lèvres et d’aller jeter un coup d’œil à cet énergumène. Pour une fois qu’il se tenait tranquille et désirait le calme de sa propre maison. On venait le faire chier. Les yeux bleus du ténébreux se posèrent sur le gamin, fronçant les sourcils, alors qu’il n'aurait même pas besoin de ça pour avoir l’air sévère, ce con. “Tu veux quoi, moucheron ? C’est une propriété privée.”

Lucifer s’était aussitôt levé pour se mettre à côté de James, grognant à l’encontre de l’individu. Mais il cessait rapidement quand le brun viendra caresser sa tête du bout des doigts. Lindley n’avait pas besoin de mots pour tenir son chien. Ces deux-là étaient bien plus lié qu’on pouvait le croire. Enfin, James plissait les yeux en voyant le type sortir quelque chose de sa poche et quand il reconnut cette bague qui avait appartenu au vieux, c’était comme un coup de massue en pleine gueule. Un coup de couteau dans le cœur. Forcément que ça lui rappelait beaucoup de souvenirs. Ce père de substitution qu’il avait tant aimé, malgré le silence qu’il avait gardé. “Ouais… La bague du vieux. Qu’est-ce que tu fous avec ça, morveux ?” Et il le jugeait du regard, ce gosse. Il venait chez lui avec l’objet le plus important de ce “père”, cet homme qui avait tenté de l’aider et qui l’avait guidé vers les Crows. “C’est un objet important. Je le pensais perdu à sa mort.” Dans le fond, ce type lui manquait. C’était bien le seul qui s’était comporté comme un père avec lui et il avait vraiment cru que cette bague était perdue depuis qu’il était décédé.

Il arrivait à James de se rendre sur sa tombe pour y déposer des fleurs, autant qu’il le faisait avec sa mère. Ils n’étaient pas enterrés si loin l’un de l’autre. Et son père biologique ? L’unique tombe qu’il ignorait. Où il n’avait pas envie de passer parce que ce type était un véritable connard. Lindley Sénior, avait sûrement une tombe du plus pourri, sans aucune fleur, où il n’y avait que le temps qui avait abimé la pierre.

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Moucheron ? Mais il est sérieux le vieux ? Je ne peux pas m'empêcher de froncer les sourcils en le dévisageant, essayant d'ignorer le clébard qui a débarqué à ses côtés. Bordel, ce que je peux détester les animaux, il ne manquait plus que ça ! Je me tiens sur mes gardes, prêt à me carapater si ce monstre décide de s'approcher de moi, et tant pis pour cette putain de bague ! Enfin non, je ne peux pas puisque j'ai promis. Quelle putain d'idée de promettre un truc aussi débile ! Au pire, je la balance par terre et je me tire vite fait bien fait ! Au vu de ce que le gars me dit, ça a l'air d'être le bon Lindley puisqu'il reconnaît la bague, et il a l'air touché de la revoir. C'est débile, c'est juste une bague. Ça change quoi qu'elle ait appartenu au vieux ? Je ne suis pas quelqu'un de très matérialiste, au contraire même. Mis à part ma moto, je n'ai rien à quoi je tienne. Si, peut-être ma vielle casquette qui en a vu des vertes et des pas mûres. C'est le seul cadeau que Jack m'ait fait, ce n'était même pas pour mon anniversaire, c'était juste comme ça. Peut-être que c'est la même chose pour cette bague, j'en sais rien... Au fond, je m'en fiche.

J'arbore une moue fermée et pleine de distance lorsque le gars me traite de morveux, résistant à l'envie de lui balancer cette putain de bague dans la tronche avant de me barrer. Il fait exprès de me parler comme à un demeuré ou quoi ? Je fronce légèrement les sourcils avant de baisser le bras, refermant ma main sur la bague que je glisse à nouveau dans ma poche. T'as envie de me faire chier ? OK, on peut être deux à jouer à ce petit jeu.

« Peut-être que c'est l'cas. Je hausse les épaules. Va savoir où je l'ai dénichée, peut-être à son doigt avant qu'ils l'embarquent, ou peut-être que je l'ai trouvée dans une poubelle. C'est pas ce qui arrive aux affaires des types sans famille ? »

Je manque ouvertement de respect au vieux, déjà parce que je n'ai pas envie que ce crétin puisse comprendre ce que le vioc représentait pour moi, et ensuite parce que je pense que c'est le meilleur moyen pour savoir si c'est vraiment son petit protégé. Il risque de s'énerver, et vu que l'autre me l'a décrit comme un sanguin qui peut s'emporter facilement, je pense que la réaction ne devrait pas tarder. Est-ce que je suis un peu suicidaire à provoquer un gars largement plus musclé que moi, accompagné de son clébard et avec une foule d'outils à portée de main ? Probablement un peu. Mais ce n'est pas franchement une surprise : il faut forcément l'être quand on fait partie d'un gang, non ?

Je finis par esquisser un léger pas en arrière, testant un peu le terrain. Je ne sais pas si le chien va décider de me bouffer ou pas, mais je préfère savoir dans quoi je mets les pieds avant de tenter davantage le Diable. Je n'oublie pas que si le vieux m'a accepté alors que je ne suis pas un Crows, ça ne sera pas forcément le cas de son chouchou. Puis franchement, qu'est-ce qu'il lui trouvait à ce type, hein ? Je me demande bien. Il a juste l'air d'un ancien taulard qui a bouffé un ours au petit-déjeuner ! Je commence vraiment à regretter d'être venu ici. Mais j'ai juste à lui filer sa bague et à me tirer, ça doit pouvoir se faire, non ? Je sonde le visage de Lindley avant de reprendre la parole, un air suffisant colle au visage. Je ne me sens pas supérieur à lui, au contraire, mais je sais que si j'en donne l'impression, ça provoquera sans doute une réaction.

« Tu serais prêt à donner combien pour la récupérer ? »

Évidemment, je ne compte pas la lui vendre ! Je suis un gars réglo, j'ai fait une promesse et je vais la tenir ! J'ai simplement envie d'emmerder un peu ce connard, ne serait-ce que pour me venger des surnoms merdiques dont il vient de me gratifier. Ça lui apprendra à me traiter comme un gamin !

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Les jeunes de nos jours… Il avait quel âge ? À peine trente ans ? Et il se permettait, ce petit con, de manquer autant de respect alors qu’il était sur le territoire d’un autre ? Parce que chez James, c'était chez lui. Son territoire. Son lieu de vie. Son cocon. Personne ne pouvait faire ce qu’il voulait où s’adresser à lui n’importe comment. Même si l’aîné n’avait pas l’air des plus agréable à première vue, il ne le permettait pas pour les autres. Lindley fronçait les sourcils, alors que son regard suivit la bague qui retournait dans la poche du mioche. Petit merdeux qu’il était… “Si tu as cette bague sur toi, je doute qu’on trouve ce genre de truc dans une poubelle aussi facilement. Tu l’as forcément connu à un moment dans ta vie.”

Où peut-être que le vioc avait parlé d’un gamin qu’il avait pris sous son aile et qu’il avait envie que James s’occupe de lui à sa sortie ? Qui sait ? Lindley ne semblait pas le faire paraître. Il soupirait aux paroles du cadet, roulant des yeux, alors qu’il croisait les bras sur son torse. Et en plus, il faisait le malin ce con… Décidément. Où est-ce qu’on l’avait trouvé celui-là ? “Ha. Ha. Ha. Junior à de l’humour.” Son regard se posait sur son chien, qui se mettait à grogner, alors qu’il relevait un peu son avant bras droit. “T’as le choix : 1. Tu te fais bouffer par le chien. 2. Je t’explose la gueule avec une clé. 3. J’te colle une balle dans la tête.” À chaque énumération, James levait un doigt, alors qu’il savait parfaitement où était son arme, sa clé, son chien. Et il ne semblait pas être le genre de mec à parler pour ne rien dire.

“Dans le cas où tu décides de te barrer en courant. T’en fait pas, mon grand, j’te retrouverais sans aucun problème.” Et il souriait, Lindley. Ce mec pouvait avoir l’air complètement malade à être aussi sérieux dans ce qu’il disait. “Sinon, tu peux être raisonnable, me filer la bague et aller te servir une bière dans le frigo.” Un petit mouvement de tête en direction d’un mini frigo, où il entreposait des bières, autant pour lui que pour les potes. Mais ces derniers temps, c’était surtout pour les potes. Parce qu’il tentait de ralentir l’alcool, même sans s’en rendre réellement compte.

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Mais c'est que j’ai affaire à un véritable détective ma parole ? Bon, j'admets que mon petit cinéma n'est pas forcément très impressionnant, et je présume que le vieux lui avait peut-être dit que quelqu'un allait lui rapporter cette foutue bague. Quoique, il a eu l'air assez étonné de la revoir. Peut-être pensait-il avoir affaire à un con qui n'allait pas honorer sa parole ? C'est possible.

Je reste silencieux, attendant de voir la suite, et lorsqu'il commence à parler de son clébard, je comprends que j'ai bien fait de m'en méfier. Je ne suis pas vraiment certain de réussir à me tirer avant qu'il ne me rattrape, et je n'ai pas particulièrement envie de me ramasser une clé à molette dans l'arrière du crâne, alors peut-être que c'est préférable de jouer le jeu ? De toute manière, je vais devoir finir par revenir pour lui refiler le bijou, donc autant éviter de me compliquer inutilement la vie. Je lâche finalement un soupir avant de rouler des yeux, signe que son petit discours ne m'impressionne pas. J'ai eu droit à des menaces de tous les types en prison, alors s'il croit m'effrayer avec la perspective de me coller une dans la tronche... Glissant à nouveau ma main dans ma poche, je récupère la bague tout en reprenant la parole.

« Qu'est-ce qui me dit que ton clébard n'va pas essayer d'me bouffer si j'approche ? »

Je n'aime vraiment pas les animaux, encore moins quand ils peuvent me mordre et m'arracher un morceau de jambe ! À quel moment est-ce qu'on se réveille et on se dit que ce serait une bonne idée d'adopter un truc pareil ? Bon, vous me direz, c'est un peu la même histoire avec les gamins. Ce n'est pas étonnant que le monde ne tourne pas rond avec tous les tarés qui vivent dessus.

J'esquisse un pas dans la direction du fameux mini-frigo tout en jetant une œillade au chien. Il n'a pas trop l'air de broncher et j'imagine que son propriétaire l'a bien en main, mais ça ne veut rien dire. Un peu encouragé par la passivité apparente de l'animal, je finis par faire un signe de la tête au gars avant de décrire un arc de cercle avec mon bras pour lui envoyer la bague sans plus de cérémonie.

« Tiens, attrape ! »

Moi aussi je peux jouer au con, c'est même ma spécialité ! Je dois avouer que ça me ferait bien rire qu'il la rate et qu'elle tombe dans l'herbe pour s'y perdre. Ce serait un peu naze comme fin pour une bague, et ça me ferait probablement mal au cœur, mais je ne le montrerais pas. Il n'a pas besoin de savoir que ça me fait bizarre de ne plus avoir cette bague dans ma poche.

L'air détendu, je fais comme si j'étais chez une connaissance familière en ouvrant le frigo pour y récupérer une bière. Ce n'est pas ma marque préférée, mais je ne suis pas bien difficile et je bois tout du moment qu'il y a de l'alcool dedans. Sans un remerciement, je l'ouvre avant d'en boire une gorgée, mon regard se baladant rapidement sur les environs pour voir ce que le gars bricolait avant mon arrivée. Intéressant, mais je doute qu'il veuille en parler pour le moment. L'histoire du vieux doit trop l'obséder. Je tourne donc la tête de son côté, posant mes yeux clairs sur son visage avant de hausser les sourcils tout en réajustant ma casquette.

« C'est bon, t'vas pas pleurer maintenant qu'tu l'as récupérée ? »

Un sourire goguenard se dessine sur mes lèvres. La dégaine typique du petit con qu'on a envie de frapper, mais c'est le rôle que je tiens le mieux !

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James esquissait un sourire en coin. C’était une bonne question. Personne ne pouvait garantir que Lucifer n’allait pas foncer dans le tas dès qu’il approcherait, sauf James, qui semblait parfaitement confiant avec son chien. Si le ténébreux ne disait rien où ne lui faisait pas un signe, le colosse n’allait pas bouger d’un poil, c’est certain et on ne peut pas nier que le brun était fier de son chien. Mais leur lien était fort et c’était sûrement l’une des raisons pour laquelle, la boule de poils était si obéissant et réagissait d’une façon protectrice avec son maître et les personnes qu’il autorisait à entrer dans sa vie.

Le quarantenaire riait doucement, plutôt amusé pour le coup, avant que son regard ne se pose sur la bague qui volait dans sa direction et qu’il la rattrapait de justesse. Heureusement qu’il avait des réflexes, bordel. Forcément, il avait du mal à quitter la bague des yeux, tout simplement parce que cela lui rappelait pas mal des souvenirs et que ce vieux con lui manquait bien plus qu’il ne voulait l’avoué. Il avait été là pour lui quand il en avait besoin et avait toujours été de bons conseils. C’était certain qu’il aurait eu besoin de lui pour diverses choses encore qui survenait dans sa vie, mais malheureusement, c’était impossible.

Lindley roulait des yeux aux mots du cadet, ronchonnant pour le coup, alors qu’il reportait bien vite son attention sur Desmond. D’ailleurs cet enfoiré connaissait son nom, mais l’vieux avait eut la bonne idée de ne pas lui révélé celui de ce jeune. “Ta gueule, p’tit con.” Il laissait son chien vaquer à ces occupations, alors qu’il allait chercher quelque chose à boire pour lui. Autant dire qu’il laissait la bière de côté pour cette fois et se contenter d’ouvrir une canette de soda, observant le plus jeune. “Alors dis-moi, gamin, c’quoi ton p’tit nom ? Tu connaissais l’vieux depuis longtemps ? Combien de temps en taule alors ?” Il était curieux, c’est certain, mais s’il faisait ça, c’était pour apprendre à le connaître. S’il voulait pouvoir aider ce gars, comme l’vieux le lui avait demandé, comme il le fallait. James avait besoin d’en savoir un peu plus sur lui.

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Je ne me formalise pas de l'insulte lancée par le bougre ronchon : j'ai déjà entendu bien pire au cours de ma vie ! Mon regard se détourne bien rapidement de James pour la bonne et simple raison qu'il n'a rien qui retienne mon attention. Je suis certain qu'il doit faire baver les filles, mais moi... Disons qu'il a un peu trop de poils au menton pour ça ! Mes prunelles reviennent irrémédiablement sur le véhicule qu'il bricole et sur le matériel dont il dispose : c'est plutôt pas mal, surtout pour un amateur ! Malheureusement, je suis forcé de m'arracher à ma contemplation pour faire face à ses multiples questions... Encore un qui ne peut pas s'empêcher de m'interroger ! C'est une maladie ou quoi ? Je n'ai vraiment pas envie de répondre à tout ça parce que je sais très bien vers quoi ça va nous amener : nos souvenirs respectifs avec le vieux. Et s'il y a bien une chose que je refuse de faire, c'est de mettre des mots sur ce qui a pu nous lier.
Un soupir m'échappe et je réponds finalement au gars, non sans avoir roulé des yeux avant de daigner verbaliser mes pensées.

« Pourquoi, t'as l'intention d'écrire ma biographie ? Je soupire une nouvelle fois au cas où il n'aurait pas compris le message, puis je baisse les yeux vers sa boisson. C'est un coca light ? Histoire d'garder la ligne. Ça doit être plus difficile à ton âge, hein ? »

Un léger rire m'échappe alors que je me fous ouvertement de lui tout en sachant très bien qu'il peut s'énerver et m'envoyer son molosse dessus. Ce serait con de finir à moitié bouffé par un clébard dans un quartier résidentiel de la ville alors que j'ai survécu à bien pire, mais ça ne va pas m'empêcher d'être fidèle à moi-même. J'avale une nouvelle gorgée de ma bière tout en reportant mon attention sur le véhicule qu'il bricole. En fait, je n'ai vraiment pas envie de parler du vieux, pas si ça me concerne, alors je vais orienter la discussion sur un terrain qui m'intéresse davantage.

« J'imagine qu'c'est la tienne, t'as pas l'air de louer ton garage... T'bosses sur quoi au juste ? »

Je ne lui propose pas mon aide, déjà parce que je pense qu'il ne ferait pas confiance à mes compétences, et ensuite parce que je sais que si les rôles étaient inversés, je ne voudrais pas qu'un crétin vienne réparer ma caisse à ma place ! Je suis juste curieux de savoir ce qu'il compte faire. Et peut-être qu'il me surprendra en me posant des questions à ce sujet ? À moins qu'il ne veuille tester mes connaissances ? Allez savoir ! Je réfléchis encore à la question quand un bruit se fait entendre non loin de moi, attirant mon attention. Je sursaute légèrement en voyant une bestiole s'affaler sur ma chaussure et je la chasse d'un coup de pied bien placé avant de constater qu'il s'agit d'un raton laveur drôlement dodu. Reniflant de dégoût, je fronce les sourcils avant de reprendre la parole.

« T'es au courant qu't'as un parasite dans ton garage ? Je tourne la tête vers lui, laissant un sourire provocateur ourler mes lèvres avant de préciser : et j'parle pas d'moi, j'te vois venir. Je sens son humour discutable à des lieues à la ronde. Vu son bide, il doit boire les bières qu'tu boudes. »

Ne me dites pas que je suis tombé sur un vieux fou qui vit avec son clébard et un raton laveur ramassé dans la poubelle ? Il ne manquerait plus que ça ! Mais ça expliquerait les déboires des Crows si tous les gars qui appartiennent au gang sont aussi bizarres que ces deux-là.

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James haussait un sourcil aux paroles du plus jeune, avant de rouler des yeux. Décidément, ce petit con n’avait pas sa langue dans sa poche. Dans un sens, c’était une bonne chose. Lindley préférait ça qu’un gamin débile et trop fragile. Mais il avait cette sensation que Desmond n’était pas un gars facile, qu’il était plutôt le genre à se fermer comme une huitre qu’une personne qui discutera facilement. Il se demandait d’ailleurs comment le vieux avait fait pour ouvrir cette carapace et avoir un minimum de communication, autre que du sarcasme. Il ricanait sur la mention du coca light, niant un peu de la tête, alors qu’il semblait plus amusé que vexer d’une quelconque façon. “Ne commence pas, j’te demande pas ton nombre de bières que tu bois par journée et si tu te drogues.”

S’il avait une attitude qui pouvait frustré James, il semblait tout de même intéressé par sa voiture et Lindley notait que se serait sûrement un des seuls points communs qu’ils auraient ensemble. Le brun sourit doucement, il faut dire qu’il était assez fier de son bébé et que ce n’était qu’une question de temps avant qu’elle ne puisse rouler. “Friand de mécanique ? Cette magnifique Mustang Shelby gt500 de 2013 est un peu comme mon bébé. J’ai fait tout le moteur, la courroie, etc. J’dois encore peaufiner quelques réglages et ensuite j’pourrais m’attaquer à l’esthétique. Vas-y, jette un œil au moteur. Forcément qu’il était fier de lui, le ronchon. Il avait tout fait tout seul, où presque. Forcément que des amis avaient donné un coup de main où était venu bosser dessus, c’était un bon moyen pour se détendre et discuter. “Si les voitures ne sont pas trop ton truc, tu peux aller jeter un œil à la moto à côté. Ducati Penigale. Je l’ai depuis… Pfiou, un moment. Sûrement un peu moins de quatre ans.” Et il en prenait soin, de son bébé, comme toutes les autres qu’il avait eu après sa sortie de prison.

Junior avait visiblement décidé de faire son entrée en scène et James grognait à l’attitude de Desmond. “Hey. Respecte Junior.” C’était sûrement la seule chose qu’il demanderait, du respect envers les habitants de cette maison, qu’ils soient humains où non. James se mettra accroupie, tendant la main vers le raton laveur qui viendra vers lui pour des caresses, avant qu’il ne lui donne un petit biscuit. Riley le lui avait confié, et même si le ténébreux n’avait jamais rien dit à ce propos, il aimait cette boule de poils. “Si tu comptes mettre un pied ici, de temps en temps, je te demanderais de respecter les habitants qui s’y trouvent. Junior et Lucifer, ici présent, sont autant chez eux que tu ne pourrais l’être.” Parce que James tenait à ce que ce soit clair. “C’est la seule règle que tu auras ici, apprends à la respecter.” Et dire qu’il avait bien plus de règles au temps où Riley était encore présente. Comme quoi, ce petit bout de femme avait fini par assagir son cœur avec le temps.

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James talk in #75465b

Heureusement qu'il ne me demande pas ça ! Il ne manquerait plus qu'il me pose des questions vraiment personnelles ! Cela dit, les interrogations lancées juste avant me semblent déjà beaucoup trop privées. Je n'ai pas envie de lui dire combien de temps j'ai passé à l'ombre, non que ça me gêne, mais simplement parce que ça ne le concerne pas. Quant au reste... Eh bien je dirais qu'en fait à peu près toutes les questions sont trop privées pour que j'y réponde ! J'ai tendance à être inutilement secret et à refuser de répondre à des questions pourtant banales, mais au moins mes collègues des Devils Diciples n'ont pas à craindre que je ne joue les balances.
Ne résistant pas à l'envie de titiller le barbu, je réponds avec un léger sourire au coin des lèvres.

« J'commence rien, c'est toi qui l'as fait. Moi, j'réponds juste. »

Enfin, plus ou moins. Mais je ne crois pas que les réponses intéressent vraiment ce gars, il les a probablement posées juste pour être poli, ou parce qu'il pensait que c'était ce qu'il devait faire. Pour le coup, je suis largement plus intéressé par sa voiture et ce qu'elle cache, du coup je délaisse la petite joute verbale pour ouvrir le capot et jeter un œil au moteur comme il m'y invite. J'observe la marchandise, glissant mon doigt sur quelques pièces pour des vérifications de routine, puis je relève le nez du moteur à l'annonce d'une autre locataire du garage.

« Monsieur s'autorise des petits plaisirs à ce que j'vois. »

Ma moto est bien le seul luxe que je m'autorise et dont j'ai réellement envie. Si ça ne m'embête guère de me balader avec le même vieux jean qui tombe en lambeaux, c'est une autre histoire quand ça concerne mon bébé ! Mais je ne compte pas en parler à James, déjà parce que je pense qu'il ignore que je suis affilié aux Devils Diciples, et ensuite parce que je veux encore me faire une idée de sa personnalité avant de partager ma plus grande passion avec lui. Sauf que je n'ai pas l'occasion de jeter un œil au bébé puisque Lindley croit utile de me faire la leçon à cause de ce foutu raton laveur que j'ai dégagé du pied. Je ne peux pas m'empêcher de rouler des yeux avant de répondre d'un ton volontairement provocateur.

« Parce qu'tu lui as filé un prénom ? J'te voyais pas comme un vieux fou avec un raton laveur comme animal d'compagnie, comme quoi l'vieux a oublié de me dire l'essentiel à ton sujet. Je soupire exagérément, le regardant comme si je le juge, puis je détourne les yeux. Mais t'en fais pas, j'compte pas m'éterniser ici. J'ai pas l'intention d'devenir ton nouveau pote, et j'crois pas qu'tu sois soudainement tombé amoureux d'moi au point d'vouloir m'retenir, donc la question est réglée. »

Je récupère la bière laissée sur le côté pour éviter d'abîmer le moteur, puis j'en avale une bonne gorgée avant d'essuyer ma lèvre du revers de ma main. Mon regard s'égare à nouveau sur le moteur de la voiture, puis passe du côté de la moto qui m'intéresse probablement plus que tout le reste. Sauf que je ne veux pas dévoiler mon jeu trop vite, alors je reprends la parole d'un air détendu.

« Et t'fais ça juste pour l'plaisir ou c'est ton boulot ? T'comptes la revendre après, ou c'est pour ton usage perso ? Je pose des questions, mais pas le même genre que lui. T'es plus amateur d'moto, ou c'est juste qu't'attendais d'trouver la bonne caisse ? »

Il a parlé d'une moto de quatre ans, ce qui veut dire qu'il devait avoir une autre caisse avant, mais il n'en a pas fait état. Ça m'intrigue, parce que ça touche à la mécanique et que je pense que la manière dont un gars prend soin de ses véhicules en témoigne beaucoup sur ses habitudes. Enfin, ce n'est pas comme si j'avais l'intention de le revoir souvent, quelque chose me dit qu'on risque de ne pas se croiser souvent vu la manière dont a débuté notre échange !

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L'ON PEUT PAYER QUI SONT ENNUYEUSES

un quote de la taille de votre choix. • ft. @Desmond Pierce

James roulait des yeux face aux paroles de Desmond. C’était quoi le problème ? Il ronchonnait en sirotant son soda et avait cette soudaine envie de boire une bière, pour ensuite lui éclater la bouteille sur la tête. Mais forcément, ce n’était pas du tout ce qu’il fallait faire, n’est-ce pas ? Son regard se posait sur Junior, haussant les épaules. “Techniquement, ce n’est pas le mien. C’est à une amie et je m’en occupe durant son absence.” Une absence indéterminée. Mais il gardait contact, parce qu’il en avait besoin et que ce petit bout de femme était et resterait sa petite protégée. Même si elle avait des emmerdes, là où elle était, et qu’il l’apprenait, il n'y avait aucun doute pour que James s’y rende pour aller l’aider. C’était ce genre de gars, Lindley, à vouloir protéger les siens.

Le vieux avait donc parlé de lui au plus jeune. Assez pour qu’il finisse par venir lui donner la bague. Ce vieux croulant manquait à Lindley, bien plus qu’il ne voulait bien l’avouer et il ne perdit pas de temps pour retirer la chaine qu’il avait autour du cou. Avec la croix de sa mère. Pour tout simplement y mettre la bague, alors qu’il laissait le gamin voir sa caisse de plus près. Il esquissait un sourire en coin, avant de remettre la chaine autour de son cou. “Une passion. Mon boulot est bien différent de ça. Et je ne compte pas la revendre.” Parce qu’il y tenait à sa caisse, surtout après bosser autant de temps dessus. James n’était pas particulièrement matérialiste, mais il tenait à ces affaires. Cette maison et ce qui se trouvait dedans était donc les seules choses où il pouvait être fier. “Je préfère les motos, la vitesse, l’adrénaline, tout ça, un véritable extase. Vu l’intérêt que tu as pour ma bécane, j’ai bien l’impression que c’est le cas également pour toi. Hmn ? Où je me trompe et tu te donnes un style.”

Le quarantenaire ricanait doucement, alors qu’il finissait son soda pour retourner le nez dans le moteur, jetant un coup d’œil à Desmond de temps en temps. “Tu me rappelles ton nom ? Je ne suis pas sûr de l’avoir entendu.” Tout simplement parce qu’il ne le lui avait pas dit ! James avait l’impression que ce gars était un véritable mystère et qu’il gardait bien des secrets. D’une certaine façon, ils se ressemblaient peut-être bien plus qu’il ne voulait le croire. “Je sais que ça ne se prête pas, mais si tu le souhaites, tu peux tester la bécane. Tant que tu m’la crash pas.” Il ne savait pas s’il allait accepté, mais Lindley était bien sympa de le lui proposer. Ce n’était pas vraiment dans ces habitudes et peut-être que le brun devenait bien plus raisonnable ces derniers temps. “Tu as trouvé un endroit où t’installé ?” La curiosité était un vilain défaut. Mais c’était parfois nécessaire.

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James talk in #75465b

Quand il me lâche qu'il se coltine le rat obèse pour faire plaisir à une amie, la lumière se fait dans mon esprit, et un sourire amusé ourle mes lèvres.

« Oh, j'vois l'genre. T'espère t'la faire, alors t'as accepté d'garder sa bestiole pour qu'elle t'ait à la bonne. T'es courageux. Aucune fille en vaut la peine. »

Si une fille minaude et essaye de se faire désirer, il n'y a qu'une solution : on lui dit au revoir et on va voir ailleurs ! Il y a bien assez de poissons dans la mer pour ne pas devenir obsédé par un seul. Cela dit, Lindley fait bien ce qu'il veut, et s'il est prêt à s'occuper d'une bestiole pleine de puces pour pouvoir tirer son coup, c'est son droit ! Je n'aurais pas pensé ça de lui de prime abord, il a un côté assuré qui m'a fait penser, peut-être à tort, qu'il n'est pas du genre à s'attacher aux nanas. Comme quoi, les premières impressions sont parfois trompeuses.

Le coup de la voiture par contre, ça ne me surprend pas. S'il est du genre à s'attacher à une simple bague, je ne suis pas étonné d'apprendre qu'il compte garder sa voiture pour la bichonner. D'un autre côté, je ne peux pas le lui reprocher : j'en aurais voulu aux gars s'ils avaient vendu ma moto durant mon passage à l'ombre, mais je serais passé à autre chose. Je ne suis pas du genre à m'attacher aux objets, ils sont tous remplaçables. Ce n'est pas comme avec les humains. On en apprend beaucoup sur les gens en les écoutant parler, c'est pour ça que j'évite de trop bavarder ou de répondre à des questions innocentes. D'ailleurs, Lindley semble en avoir en réserve ! Ça me fait soupirer, mais ça m'amuse un peu. Je souris légèrement avant de répondre à ses moqueries – ou ce que j'interprète comme tel.

« Va savoir. À c'qui paraît, les mecs à moto ça plaît aux filles, donc c'serait une bonne idée. »

A-t-il besoin de savoir que j'ai conduit une moto avant d'être assis derrière le volant d'une voiture ? Non. C'est Jack qui m'a appris sur sa vieille moto, c'était un des rares bon moment de mon adolescence d'ailleurs, et c'est sans doute pour ça que je les aime autant. Au fond, j'ai beau râler et jouer les mecs distants, je reste humain et les bons sentiments me touchent forcément. Cela dit, il y a une marge entre le fait de les ressentir et de les dévoiler, et je n'ai pas l'intention d'en dire plus à Lindley, même s'il semble s'obstiner à me poser des questions. Pourquoi mon prénom l'intéresse autant ? Sans doute pour la même raison qui me pousse à refuser de lui dire : parce qu'il voit que je ne lâche pas l'affaire. Ça m'amuse, et je poursuis sur le même ton.

« Ouais, les problèmes d'audition ça arrive avec l'âge. P't'être qu'tu devrais consulter. Je m'accroupis pour jeter un coup d'oeil à la moto alors que Lindley me propose un truc qui me surprend. Tu m'connais pas, et tu serais prêt à m'laisser conduire ta moto ? Y s'passerait quoi si j'décidais d'pas rentrer ? Un sourire moqueur ourle mes lèvres. Ou si j'la plantais et qu'je m'tirais avant qu'tu m'retrouves ? »

Je ne laisse personne conduire ma moto, même les gars du gang, alors autant dire que sa proposition me surprend vraiment. Je me demande si le vieux lui a parlé de moi ? J'en doute. Je ne vois pas pourquoi il le ferait ! S'il m'a parlé de Lindley, c'était parce qu'il avait besoin de moi pour lui refiler sa bague, sinon je pense que je ne connaîtrais même pas son existence. Bah, tout ça m'importe peu ! S'il me laisse la conduire, je ne vais pas dire non parce que ce n'est pas le genre de moto que j'ai l'habitude de chevaucher, mais s'il reprend son offre, je survivrais. Sauf qu'il semble décidé à m'interroger une fois de plus. Cette fois-ci, je pose un regard méfiant sur lui.

« Tu poses vraiment beaucoup d'questions. T'es sûr qu't'es pas une gonzesse ? Mon regard se fait plus taquin alors qu'un bref sourire passe sur mes lèvres. T'en fais pas pour ça. »

Je ne mens pas, mais je ne dis pas la vérité pour autant. Ça ne le regarde pas, et rien que le fait d'avoir menti à mon agent de probation pourrait me coûter cher, alors je n'ai pas l'intention de lui dire quoi que ce soit à ce sujet. Mon attention se reporte sur la moto, puis je me redresse avant d'essuyer machinalement mes mains sur mon jean rapiécé.

« Tu l'as améliorée, ou tu t'contentes des réparations d'routine ? »

C'est bien le seul sujet qui m'intéresse réellement aujourd'hui, et j'espère que Lindley va finir par lâcher l'affaire avec ses autres questions ! Je sais que tout serait plus simple si je répondais directement plutôt que de chercher des idées pour esquiver tout ça, mais ce n'est pas mon genre. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?

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Il était sérieux ? Vu la tête qu’il faisait… Il semblait bien. James n’aimait pas trop ça, surtout quand cela concernait Riley. Elle était une femme importante pour lui, mais pas au point qu’on le voit lui tourner autour uniquement pour la baise. Il avait beau être un connard, il ne l’était pas totalement. Le brun grognait, forcément, alors qu’il niait de la tête, un lourd soupir s’échappant de ses lèvres. “Tu te rendras compte, un jour, que toutes les femmes ne sont pas uniquement faites pour se faire baiser.” Et les hommes aussi, mais il se gardait bien de le dire. Après tout, personne n’était censé savoir pour sa bisexualité. “Tu peux très bien être pote avec une nana sans vouloir chercher à la sauter à tout bout de champ.” Il sentait que ce gosse avait une vision bien précise des femmes et de ce qui l’entourait. Mais c’était sûrement un indice sur la vie qu’il avait pu avoir jusqu’à maintenant. Si James voulait respecter la promesse du vieux, de faire attention à ce gamin, il allait devoir creuser, mais surtout être patient avec Desmond. “Riley est une amie, et seulement une amie. Je te déconseille de la voir autrement.” Parce que cela risquait de frustré le grognon, bien plus qu’on ne pouvait le croire.

Le ténébreux observait sa bécane, cette petite fierté parmi tant d’autres. Il y tenait, c’est certain, normalement, personne ne la conduisait. Personne à part lui en tout cas. Il esquissait un sourire en coin, plutôt amusé pour le coup. Desmond n’avait sûrement pas conscience que le vieux croulant avait parlé de lui à James, quelques fois, sans pour autant en dire plus que le strict nécessaire. Mais il se gardait bien de le lui révéler, parce qu’il fallait parfois laisser le temps faire les choses. “Je suis seulement curieux. Mais j’ai au moins compris une chose sur toi, t’es pas très bavard quand ça te concerne.” Et il ne pouvait pas vraiment lui en vouloir, bien au contraire même. Ce gamin lui rappelait… Tout simplement lui. Il rit doucement en s’approchant de sa moto, en profitant pour lui tapoter l’épaule. Plus un geste fraternel qu’autre chose, alors qu’il se mettait accroupie devant son bébé. “J’ai changé le pot d’échappement, fait la couleur. À la base, elle était bleue. Horrible. J’ai préféré la repeindre en blanc, pour qu’elle ait l’esthétique d’origine. J’avais une Kawasaki avant, mais cette beauté était plus puissante, forcément, tu dois connaître, les gars comme nous sont des adorateurs d’adrénaline et de vitesse, n’est-ce pas ?”

James savait qu’il pouvait conduire dangereusement, mais c’était son style, son moment pour s’échapper de tout le bordel qu’il avait dans la tête. Parfois cela l’aidait, surtout s’il avait ce léger manque d’alcool qui venait le terrasser. Alors, il partait faire un tour. C’était le seul moyen qu’il avait trouvé pour apaiser son esprit et ne pas craquer en chemin. Le seul problème qui persistait c’était sa consommation de drogue et ça… c’était une autre histoire.

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Quand il commence à me faire une leçon sur les femmes et l'amitié qu'on peut entretenir avec elles, je ne peux pas m'empêcher de lever les yeux au ciel d'un air mi-blasé, mi-dépité. Quand il termine son petit laïus, je soupire exagérément fort avant de rétorquer d'un ton un peu trop provocateur.

« C'est dingue, à chaque fois qu'je m'dis qu't'es pas aussi barbant qu't'en as l'air, t'arrives à m'démontrer l'contraire. C'est à croire qu'il le fait exprès ! Les femmes, c'est soit des daronnes, soit des potentiels plans cul. Si elle est moche, j'veux bien croire qu'elle puisse être hors catégorie, mais c'est toujours pas une pote. Je dis ça d'un ton d'évidence, surpris qu'il puisse penser différemment. T'es vraiment un mec bizarre. »

J'ai lâché ma conclusion d'un ton dépité, me demandant comme le vieux peut avoir trouvé ce gars « exemplaire » avec un tel discours. Oh, il m'est déjà arrivé de traîner volontairement avec des filles, mais à un moment ou à un autre, on a forcément fini par passer un bon moment ensemble. En fait, en y réfléchissant bien, les seules nanas que je revois sont d'anciens plans d'un soir qui refont parfois surface dans mon existence, que ce soit pour remettre le couvert ou simplement par hasard. Cela dit, ça ne veut pas dire que j'envisage d'en faire mes amies ! Une nana restera toujours une nana et elle ne pourra jamais piger mes priorités, sans compter qu'elles ont tendance à être beaucoup trop sentimentales à mon goût.
Un énième soupir m'échappe alors que je songe au fait que ce gars est vraiment plein de surprises, et pas seulement des bonnes si vous voulez mon avis.

Je préfère me préoccuper du sujet qui semble nous réunir tous les deux : sa moto. J'admets que c'est une belle bécane et qu'il l'a bien retapée, surtout si ce n'est pas son boulot. D'ailleurs, je n'ai même pas cherché à savoir ce qu'il fait pour gagner sa vie... Peut-être parce que je m'en fiche ? Ça ne changera pas ma vie, sauf s'il est flic, mais bizarrement je doute que ce soit le cas ! Je suis un égoïste, et en prime je n'aime pas parler de moi comme il l'a compris, j'espère que ça le dissuadera de poser d'autres questions.

« P't'être parce qu'ça n'concerne que moi, justement. »

Un bref sourire bravache passe sur mes lèvres alors que je lui fais comprendre qu'il n'en apprendra pas plus à mon sujet. Au fond, je doute que ça l'intéresse réellement, ou alors c'est juste pour s'occuper l'esprit durant notre discussion, puis il oubliera dès que je me tirerai d'ici. Je ne bronche pas quand il me tapote l'épaule, même si je me méfie un peu de ce genre de geste amical, puis je porte ma bière quasiment vide à mes lèvres pour la terminer tout en écoutant ses explications sur les améliorations apportées à sa moto. Ça m'arrache un hochement de tête machinal alors que je détaille ce que j'ai sous les yeux d'un regard intéressé et aiguisé, puis je concède enfin quelques informations au sujet de mes préférences en matière de moto.

« Ouais, c'est pas mal du tout. Perso, j'préfère les Américaines, j'trouve ça plus fiable, et puis tu peux vraiment les faire comme tu veux. Ce n'est pas difficile de commencer de rien et de se retrouver avec un véritable bijou. Évidemment, s'tu t'y connais, tu peux tout transformer en bête de compétition, mais c'est pas pareil. Enfin, c'est mon avis. »

La mécanique est bien le seul domaine où je peux tolérer des avis divergents. Si ce gars aime les Japonaises ou des marques plus exotiques, c'est son droit ! La prise en main n'est pas la même et c'est sûr que les sensations ne seront pas les mêmes sur une Chopper ou une moto prévue pour les circuits. Cela dit, en ville et dans les environs, je doute qu'une bête de course soit très utile. Je note toutefois qu'il m'a parlé de puissance, ça veut probablement dire qu'il se laisse aller à quelques folies. Mes prunelles claires se détournent enfin de la moto alors que j'écrase la boîte de bière vide dans ma paume, puis elles se posent sur le visage de Lindley.

« J'savais pas qu'les Corbeaux ça aime la vitesse. T'es plutôt conduite sur circuit, ou t'aimes bien faire des folies sur les routes à l'extérieur ? »

Vu la bague que le vieux m'a filée, je ne risque pas grand-chose en présumant que ce mec est sans doute un Crows, mais rien ne l'empêche de m'envoyer sur les roses en décidant d'aborder le sujet. Si j'étais à sa place, c'est ce que je ferais, mais tous les mecs ne sont pas des connards comme moi. Et tant mieux d'ailleurs, la vie est bien assez merdique comme ça pour que tous les types qui peuplent cette ville en rajoutent encore une couche.

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Ce gamin était bien plus compliqué à cerner que ce que James aurait pu pensé, mais si l’vieux le lui avait envoyé, c’était parce qu’il pensait pouvoir apaiser un peu l’esprit de ce gamin, non? Allez savoir. Lindley ne savait pas vraiment ce que l’avenir lui réservait, il était même le genre à parcourir la vie de jour en jour, de voir ce que le lendemain lui réservait et de prendre du bon temps. Il ricanait à chaque fois ce gosse lui parlait, se foutant pas mal de la façon dont il le voyait. Tout simplement parce que ce gars apprendrait bien à connaître le ténébreux. Tout comme lui, apprendrait à connaître Desmond.

Lindley sourit doucement, alors qu’il regardait cette beauté qui était sa bécane, entendant bien ce que le gamin disait. Et il riait, le ténébreux, quand il lui disait clairement qu’il était au courant pour son appartenance au gang. James ne comptait pas le cacher, cela ne servirait à rien, de toute façon. Il était déjà au courant et le vieux était l’un des types qui l’avait intégré aux Corbeaux. “Certains d’entre nous ont de bons goûts, tout de même.” Et il y en avait d’autres qui en avait moins, bien entendu.

Le ténébreux sourit doucement, avant de se redresser, s’étirant un peu pour le coup, alors que le jeune homme se craquait un peu le cou. La vieillesse, pourtant il avait l’air plutôt jeune, tout simplement parce qu’il prenait soin de lui, malgré la merde qu’il consommait. “Je vais sur circuit de temps en temps, mais je préfère pousser sur les routes lambda. Le danger, l’adrénaline, j’dirais que c’est plus puissant parce que tu ne prévois pas ce qu’il peut se passer, contrairement sur un circuit. Tu as déjà conduit en circuit ? Il y en a un pas trop mal dans le coin, si tu veux, je te filerai l’adresse où on pourrait aller se faire une petite course.”

James n’était pas une mauvaise personne dans le fond, grognon, c’était certain, profondément méchant, disons qu’il avait surtout cette carapace et des petits problèmes qui le faisait facilement péter un plomb. L’alcool et la drogue qu’il consommait ne l’aidait pas à être plus apaisé, non plus. Même s’il essayait de ralentir l’alcool, ce genre de choses restaient assez compliqué.

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« Ah ouais ? »

Je parle d'un ton provocateur, haussant les sourcils comme si l'annonce de son bon goût me surprend. Je dis ça par contrariété, et parce que c'est dans ma nature de provoquer les gens, même quand je ne les connais pas. Je sais bien que ça finira par me retomber sur le coin de la gueule, mais c'est comme ça ! Disons que c'est plus fort que moi.

Quand James se relève, je laisse passer quelques secondes avant de l'imiter, remettant en place ma casquette d'un geste machinal, puis posant mes yeux sur son visage alors qu'il me parle d'un circuit pour moto. Ce n'est pas trop mon truc parce que je n'ai pas forcément une conduite qui s'y prête, mais j'imagine que ça doit en valoir la peine. Après tout, une moto reste une moto, et même si la conduite sur circuit est très différente de celle sur route, j'imagine que les bases doivent rester les mêmes. De toute manière, quand ça concerne la mécanique ou la conduite sur moto, je suis toujours partant pour apprendre de nouvelles choses ! Cela dit, la remarque de Lindley me fait sourire, parce que ça veut dire qu'il a en tête l'idée qu'on va se revoir. En ai-je envie ? Il n’est pas antipathique et si le vieux l'aimait bien, c'est qu'il doit être fréquentable, mais les gens changent et Lindley est dehors depuis un moment, alors... Fidèle à moi-même, je décide finalement de poser clairement la question.

« Attends, ça veut dire qu't'as envie qu'on s'revoit ? T'es au courant qu'à la base j'ai juste promis d'te refiler la bague ? J'imagine qu'il l'a deviné, alors je peux bien lui dévoiler ça. J'ai jamais conduit sur circuit, c'est pas trop mon style, mais ça m'branche toujours d'tester d'nouveaux trucs quand ça touche aux motos. Alors, disons qu'on pourra s'faire ça, ouais. Je marque une pause avant de reprendre de mon habituel ton bravache. Mais faudra garder tes questions pour d'autres potes du vieux, si j'viens, c'est pour conduire, pas pour répondre à un interrogatoire. »

J'imagine que Lindley s'en fiche un peu que j'accepte ou que je refuse sa proposition, mais je préfère clarifier la situation. Je ne suis pas du genre à me faire de vrais potes, pas depuis que je suis arrivé à Detroit du moins. Je n'ai pas particulièrement envie que l'ex-taulard devienne mon nouveau bro et qu'on se raconte des anecdotes sur le vieux devant un bon match avec une bière à la main. Ce n'est pas mon genre de délire, surtout quand les potes en question sont plus vieux et ont une désagréable tendance à vouloir se mêler de votre vie au prétexte de vous aider. Je ne sais pas encore sur quel pied danser avec ce gars, alors avant de le laisser entrer dans ma sphère privée, je dois le jauger. Peut-être qu'il n'en aura pas envie et qu'il va finir par laisser tomber ? Au fond, je m'en fous un peu. On a beau partager certains points communs, je ne suis clairement pas fait pour avoir des relations très poussées.
Quelques secondes de silence se sont installé le temps que je réfléchisse à tout ça, je décide donc de reprendre la parole avant qu'il n'ait eu le temps de répondre.

« Ma moto est pas franchement faite pour la conduire sur circuit par contre. J'admets en avoir une, mais je pense qu'il l'a déjà deviné. Enfin, j'peux en trouver une qui passe pour c'jour-là s'tu tiens vraiment à te prendre une déculottée. »

Je sais bien que je ne devrais pas être aussi sûr de moi, surtout si je n'ai jamais conduit sur circuit, mais ça aussi c'est plus fort que moi. Quand on n'est pas doué pour grand-chose, il faut bien compenser avec les domaines dans lesquels on excelle, non ?

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‡ ▬ BEYOND THE VEIL ▬ ⚖