Weather forecast for tonight : Dark, with widely scattered light by morning. - Eliott & Wesley

Wes n’avait pas encore décidé si la cheffe donnait dans la blague douteuse, dans la vengeance mesquine ou si son karma lui en voulait pour une raison obscure. Toujours est-il qu’il avait été désigné pour se rendre à cette convention de journalisme. Il était censé « prouver que le métier a de l’avenir » et qu’on pouvait l’exercer de manière stable, passionnée, pendant des années.

La blague.

Et en plus, il a fallu que ce soit avec Eliott Lloyd.

Sans cette compagnie imposée, Wes aurait râlé pour la forme tout en trouvant le moyen de s’amuser, de mettre une bonne ambiance, de faire une ou deux conneries sans conséquence et serait revenu auréolé de gloire (dans sa tête uniquement) après avoir profité de deux jours presque de congés. Mais voilà, il y avait Eliott…

Eliott le canon. Eliott aux dents longues. Eliott à l’ambition aussi imposante que son talent. Eliott engagé. Eliott encore la tête pleine de rêves. Eliott le marrant. Eliott qui briguait sa propre place et qui se l'appropriait en le laissant sur le carreau. Eliott le petit jeune. Eliott et son sourire qui ne le laissait pas indifférent tout en l’agaçant prodigieusement.

Ce n’était pas dans ses habitudes, à Wes, de vivre une situation comme celle-là. Il avait besoin de connaître les gens pour les désirer et au départ, Eliott l’énervait. Il ignorait à quel moment il s’était rendu compte que son regard se perdait dans le creux de ses reins ni quand exactement des pensées inadaptées lui avaient traversé l’esprit. Rien de plus rien de moins. Mais en apprenant qu’il était marié, père, forcément… Ç'avait douché son enthousiasme et il était passé par tous les comportements, même ceux qui ne lui ressemblaient pas.

Entre eux, ça jouait les montagnes russes, ça balançait des piques dont on ne savait pas très bien si elles tentaient de provoquer un rire ou un assassinat.

Un sac de voyage et les voilà embarqués dans un périple de six heures à écumer une playlist détestable, à parler de n’importe quoi pour tenter de combler le silence gênant et à ne surtout pas crever l’abcès qui purulait entre eux à base de qui pro quo, de non dits et d’autres choses encore inconnues. C’était un soulagement d’arriver, de se dégourdir les jambes après qu’Eliott ait refusé qu’il conduise la moitié du trajet, de manger un morceau et de retrouver d’anciens contacts. Il respirait, Wes, et commençait à se dire que ça ne serait pas si terrible quand on leur annonça qu’ils allaient partager non seulement une chambre.
Mais un lit.

— Non. Par contre je chante en dormant, j’espère que t’as rien contre un petit rap à deux heures du matin, répondit-il du tac au tac avec un sourire amusé.

Un sourire factice qui ne montait pas jusqu’à ses yeux. La réceptionniste, consciente qu’ils ne l’écoutaient pas, avait cessé de parler tout en continuant à arborer cet air désolé. Il ne savait pas trop quoi faire de cette situation et croyait de plus en plus à l’hypothèse de la mauvaise blague. Il allait devoir se montrer particulièrement inventif pour survivre à ce séjour sans perdre sa dignité.

Ils durent emprunter les escaliers parce que l’ascenseur était pris d’assaut et grimpèrent donc trois étages à la force de leurs jambes. Wesley arriva en haut avec la sensation qu’il allait mourir à la prochaine inspiration et laissa son collègue ouvrir la porte. Il découvrit par-dessus son épaule la présence d’un seul grand lit pour deux personnes.

Enfin… grand… tout était relatif vu leurs gabarits respectifs.

— Je te préviens, je couche pas le premier soir.

Il essayait de faire comme si ce n’était pas grand-chose, pas même un désagrément, sur le ton de la petite blaguounette. Il espérait surtout ne pas avoir d’érection inopportune au mauvais moment et regrettait de ne pas avoir emporté de pyjama. Il dormait toujours en caleçon…

Eliott avait de la répartie, quelque chose que Wes appréciait. Il ne put retenir un sourire avant de lui emboîter le pas pour l’escalade infernale suivie par la découverte profondément perturbante de la réalité qui serait la leur pour le séjour. Une nuit… C’était long, une nuit. Wes avait déjà connu des insomnies, il avait parfois du garder les yeux ouverts pour finir un article. Il savait que le temps possède une consistance différente quand le soleil ne brille plus dans le ciel, que celui-ci soit bleu ou gris, encombré de nuages vomissant de la neige ou de la pluie.

Pour tenter de désamorcer la situation, Wes se fendit d’une blague et ignorait comment prendre la réponse d’Eliott. C’est ce qui l’énervait le plus chez lui. Dans l’esprit du journaliste, son collègue est marié (ou en passe de l’être il ne sait plus très bien), il a un enfant, il doit se montrer sérieux, fidèle, engagé, et pas laisser trainer ce genre de sous-entendus. Surtout envers lui, pensa-t-il avec frustration, comme si Eliott possédait le don de lire ses pensées. Une chance que ça ne soit pas le cas…

Pour ne rien arranger, voilà qu’il se déshabillait ! Les chaussures, encore, ça se tenait mais le pull, cette chemise à moitié ouverte, c’était compliqué de ne pas laisser trainer un regard. Wes ne le désirait pas spécialement, en cette seconde. Il craignait surtout les malentendus, les qui pro quo, les ennuis avec le futur époux, aussi. Il avait donné, question passage à tabac…

— Si j’étais gêné, je dormirais dans le fauteuil ou même dans la baignoire. J’suis un grand garçon, j'ai déjà vu des abdos et des culs hein, rétorqua-t-il d’un ton piquant. Le tien est un peu plat pour moi si ça peut te rassurer.

Comme un bouclier dressé. Il n’avait même pas pensé à vérifier que la salle de bain disposait bien d’une baignoire. Il aurait eu l’air fin, recroquevillé dans la douche avec une couverture et un coussin… Wes avait déjà passé la nuit dans des endroits improbables mais là, il aurait touché le fond ou presque. Pour peu qu’en prime, Eliott ait besoin de pisser pendant la nuit…

Chassant ces pensées parasites, il retira son manteau et ouvrit la penderie pour l’accrocher à un ceintre avant de le rejoindre près de la fenêtre pour se livrer à une analyse minutieuse de la consistance des flocons de neige à travers une vitre. Il haussa finalement les épaules.

— Sûrement. Puis l’électricité va sauter, le chauffage aussi, on va devoir se serrer sous la couette pour ne pas mourir de froid… Le début de mauvais porno standard, quoi. Si t’étais une nana, ça aurait sûrement donné un môme avec une belle histoire à raconter. L’angoisse…

Il rit, fort, trop pour que ça soit naturel. Le rire masculin typique supposé cacher un léger malaise.

— T’as prévu le strip-tease complet ? Non parce que j’ai que des pièces à glisser dans ton slip alors te donne pas cette peine, enchaina-t-il toujours sur le ton de la plaisanterie.

Lui est un peu pudique, il n’ose pas retirer son pull, son pantalon, même ses chaussures. Il lorgne sur la salle-de-bain et commence à envisager de squatter une autre chambre cette nuit. Sauf qu’il se sait incapable de coucher avec un inconnu ou même une inconnue. Reste encore l’option de brancher quelqu’un de suffisamment bourré pour s’évanouir et ne pas se rappeler de son refus.

Ouais, voilà un super plan !

Wesley se sentit un peu con. Il détestait le body-shaming et n’avait pas envie de le pratiquer, même sur Eliott Lloyd ou… surtout, sur Eliott Lloyd ? Bon, le temps qu’il tranche cette question, il pouvait culpabiliser pour ses paroles. Il ne voulait pas le blesser (si tant est que ça soit possible) juste cacher son malaise et le désir qu’il entretenait à son encontre depuis un moment déjà. Un désir teinté de frustration, d’incompréhension, de déception, d’agacement, et de tout un tas d’autres adjectifs du spectre négatif, qui allaient et venaient allègrement. Éprouver de la simple animosité envers quelqu'un, ç'aurait dû être simple. Évident. Pourquoi fallait-il forcément que cela se complique ? Wesley détestait détester quelqu'un.

— Na I keep that only for you, rétorqua-t-il crânement.

Elle sortait d’où, cette petite amie ? Wesley n’abordait jamais sa vie privée au travail et quand bien même aurait-il dû le faire, elle tenait du désert depuis quelques temps déjà. Des histoires, il en avait eu mais elles se finissaient toujours de la même façon : lui avec le cœur brisé par ses propres attentes, ses propres illusions, et par sa propre peur paradoxale de s’engager -ce qui impliquait de souffrir. Un peu lâche, Wesley, parfois…

— You don’t have enough ass for an article, sorry babe.

Et les piques continuaient à fuser avec toute la mauvaise foi du monde (Wes n'admettrait jamais qu'il trouvait le cul d'Eliott tout à fait regardable), pendant que le journaliste roulait des yeux pour feindre de ne pas avoir été blessé par sa critique acerbe. Foutu petit jeune aux dents longues…

— Save that for someone who actually care, this poor music deserve better.

Il détourna vivement le regard parce qu’en répliquant, Eliott avait retiré sa chemise pour enfiler un t-shirt super cool ridicule mais Wes avait eu le temps de voir (pas qu'il regarde mais l'autre s'exhibait sans vergogne de partout...), malgré lui, une large cicatrice au niveau des reins. Quelqu’un l’avait-il poignardé, lui aussi ? Ça semblait plus large que les marques sur son propre corps. S’éclaircissant la gorge, il roula des yeux à sa dernière remarque.

— I know that, my god dude you’re engage you’re not suppose to touch anybody except your husband. Can’t you respect anything ? No of course not, stupid question. Relax you Frankie I don’t think you’re a predator. Just an alien.

Très content de son jeu de mots, Wes se remit à sourire comme à son habitude, comme si l’échange précédent n’avait pas eu lieu, un peu plus détendu mais pas de beaucoup.

Wesley ne se considérait pas comme quelqu’un de coincé et ne se serait pas cru traditionnaliste au point d’être mal à l’aise avec cette version d’une relation amoureuse dépeinte par Eliott. Pourtant, il avait du mal à imaginer qu’en aimant sincèrement quelqu’un, on puisse avoir envie de coucher avec quelqu’un d’autre. Pour lui, c’était inconcevable et dans ses relations passées, si du désir pour une autre personne naissait en lui, alors il mettait fin à la relation sans plus attendre car c’était un signe indéniable. Ce dont lui parlait son collègue c’était… profondément perturbant et inconcevable.

Pourtant, Wes avait l’esprit ouvert et il ne jugeait pas.
Ce qui ne l’empêchait pas de ressentir une certaine frustration mêlée de déception.
Parce que pendant une demi seconde, le temps qu’Eliott finisse sa phrase…
Il chassa cette pensée.
We’re colleagues.
Et c’était une personne décente.
Wes supposait donc qu’il ne devait pas être suffisamment bien pour être touché.

Il détourna le regard juste à temps pour ne pas avoir la vision de ses fesses qui dansaient devant ses yeux (même si en réalité il avait eu l'occasion de voler une photographie mentale du spectacle) et, les bras croisés, fixa l’extérieur à travers la fenêtre après s'être assis sur le lit. La neige tombait toujours, tout comme les questions de son collègue. S'il ne réagit pas à la première question sur Maggy, il manqua de s'étouffer à la suite.

— Are you kidding me? Lara hates me. I can’t even understand why she kept me here.

Il soupira. Pourtant, il avait essayé de se faire apprécier d’elle et s’était démené pour faire un bon travail mais ça n’avait rien changé. Wes avait besoin que les gens l’aiment, que les gens rient avec lui et Lara n’était qu’une façade, il le sentait. Ses yeux ne mentaient pas. S’il apprenait jamais de quelle manière il avait conservé son poste, il risquait de vivre une grosse crise existentielle.

Le journaliste se laissa tomber sur le lit et s’allongea en regardant le plafond, soudain vidé de son énergie. Eliott avait le chic pour la lui pomper, sans mauvaises pensées.

— Why do you care? I don’t talk about my private life, ‘cause you know, it’s private.

La véritable raison se trouvait ailleurs : il n’en avait pas, de vie privée, depuis un moment et il se sentait seul, seul à désirer quelque chose d’inaccessible, seul à toujours s’enticher de la mauvaise personne. Mais ce n’était pas un salaud, alors il tourna la tête vers Eliott qui était désormais habillé et d’un air un peu triste, ajouta sans crier gare :

— Sorry for earlier. Your butt is great and yes you don’t have to explain yourself. Don’t know why I’m such a dick with you sometimes. I suppose you inspire me dickness.

Un sourire éclaira son visage devant sa petite plaisanterie et il détourna le regard pour ne pas se perdre trop longtemps dans les yeux d’Eliott.

Des histoires d’amour haine, c’est bon pour les films. Pourtant, oui, dans une autre vie, Wesley aurait pu tomber amoureux de Lara. Peut-être qu’au début, il avait espéré que cette relation deviendrait autre chose mais il a bien compris que ça ne serait pas le cas. Il est attiré autant par les hommes que par les femmes, il en a aimé, des femmes, d’ailleurs, mais ça n’a jamais duré bien longtemps. Il se fatigue lui-même, Wesley.

Peu convaincu par les arguments d’Eliott, il se contente de hausser les épaules et de passer à un autre sujet de discussion, moins dangereux. Il craint que Lara ne les entendre depuis Detroit et que ses foudres ne s’abattent ici, sous la forme d’une tempête de neige meurtrière. Peut-être qu’ils ne rentreront jamais…

La manière dont son collègue lui répond sur sa vie privée déborde de lassitude. Wesley se sent gêné, gêné d’avouer qu’il n’y a rien à garder privé ou plutôt… qu’il y a bien certaines choses mais tout serait compliqué, alors. Presque davantage qu’avoir Eliott si proche de lui, allongé sur le lit à ses côtés mais sans aucune arrière pensée. Pas comme lui, ce dont il se tance sévèrement. Il est en couple, nous sommes collègues. Il a bien entendu l’explication sur le couple libre mais…

— An arse, here we are with de big words, retorque-t-il du tac au tac avec un sourire amusé.

Ce qui n’empêche pas Eliott de continuer à se confier, à lui parler sans fard, sans véritable gêne, au contraire de Wes qui n’arrive pas à simplement lui dire tu me plais et je ne l’assume pas, en partie parce que tu me renvoies chaque jour en pleine face l’image de ce que j’ai été et de ce que je ne suis plus.

— Usually, people prefer when other people like them. Stop believe you’re unique.

Ça peut sembler agressif mais il le dit sur le ton léger de la plaisanterie pour essayer de dissimuler ce que lui inspirent ces mots-là. Lui aussi avait eu envie qu’ils soient amis, au départ, et il l’appréciait. Comment la rivalité avait-elle fini par naître ? Au détour de quelle petite phrase ? De quelle remarque ? De quel article ? Wes s’humecte les lèvres et soupire en ramenant son bras sur son visage afin de se cacher les yeux dans le creux du coude. Il n’a plus envie de voir le monde. Hélas, se cacher un sens renforce les autres. Le parfum d’Eliott lui chatouille les narines. Son cœur bat plus vite. Il sent sa chaleur toute proche. Il l’imagine. Il déglutit.

— It’s just hard to… look at you everyday and…

et ne pas céder à la tentation.

— You’re a mirror for me, I saw myself younger, with my hopes, my fights, and I saw me now with my… sloth? I just let myself live. And you remind me that every fuckin' day. That’s probably why.

Lâche, qu’il se dit. Qu’il se traite. Il aurait pu se confesser sur l’autre aspect de sa réalité mais il préfère se jeter lui-même en pâture, lui et son ego tout masculin, plutôt que d’admettre qu’il a juste envie de se blottir contre lui, pour essayer. De déposer ses lèvres sur les siennes, pour essayer. De l’entendre soupirer de plaisir, juste… pour… voir si c’est aussi satisfaisant que dans sa tête.

Son poing se crispe, il reste ainsi. Caché.

Un sourire passe sur ses lèvres, nerveux. Si seulement il ne le trouvait pas attirant… tout serait plus simple. Il plaisanterait avec lui comme avec n’importe qui d’autre et ils riraient ensemble parce que Wes se définissait comme quelqu’un de drôle, de bon vivant, d’agréable à fréquenter. Sauf avec Eliott. Parfois, il y arrivait et souvent, souvent il se comportait comme le connard qu’il n’était pas puis se sentait coupable et en voulait encore davantage à cet adorable petit arriviste de lui faire ressentir ces émotions. Il n’était pas juste avec Eliott, Wes. Il aurait dû lui dire, là, que lui aussi aimait voir sa tête tous les jours mais les mots ne sortirent pas. Coincés dans la décence de sa gorge.

Voilà que son rival tente de le consoler, de lui remonter le moral par des compliments qu’il pense, ou qu’il feint de penser par gentillesse. Tout cela se parasite dans sa tête quand Eliott se laisse glisser sur le matelas, lui fait face, leurs corps trop proches, leurs visages encore davantage. Il sent son souffle quand il lui parle, son cerveau disjoncte. Il n’y a plus qu’un bruit blanc et une décharge de chaleur dans le creux de ses reins quand le doigt d’Eliott poke son ventre un peu mou.

— It’s just your privilege, murmure-t-il.

Il se perd dans son regard. En cet instant, il ressemble à un gosse, fragile, faible, exposé à la violence du monde. Il a envie d’expliquer à Eliott qu’il le désire mais que le fait qu’il soit en couple le bloque. Qu’il aimerait l’embrasser pour voir si c’est aussi bien que ce qu’il a pu s’imaginer mais qu’il n’ose pas parce qu’il a peur de tomber amoureux de lui. Il aimerait lui demander s’il peut dormir contre lui, juste cette nuit, parce qu’il se sent tellement seul que ça lui ferait du bien de se voiler la face un petit peu, et que le creux de son épaule a l’air confortable. Peut-être que ces secrets honteux passent dans ses iris ou peut-être que ça ne fonctionne que dans les films. Quoi qu’il en soit…

Option 1 : Wesley embrasse Eliott.
Option 2 : Wesley se contrôle.

— I’m funny. It’s literally my thing, being funny. Everyone agreed on that.

Il roule des yeux. Le moment est passé, il a résisté à sa pulsion qu'il tente d'enterrer sous des sujets plus légers.

— Here's a joke : The teacher asked Tom: Did your mother help you with your homework? and he answers : No, she did them all by herself. Uh ? Uh ?

Il le regarde, tout content de sa blague nulle. Il en connait à la pelle, des pareilles. Une chance pour le monde, l'humour de Wesley est en général situationnel, sarcastique. Il essaie surtout de détendre l'atmosphère et de calmer les papillons dans son bas ventre qui eux, n'ont pas arrêter de danser depuis qu'Eliott s'est rapproché. Au moins, en racontant des conneries, il évite de fixer son attention sur ses lèvres et résiste à la tentation.

Sa blague tombe un peu à plat, semble-t-il. Même pas un petit rire gêné. C’est vrai que Wesley ne l’a pas bien racontée mais à sa décharge, il essayait surtout de noyer un poisson. Avec succès ! Il ne s’attendait par contre pas à ce qu’Eliott réplique avec une blague encore pire. Le journaliste considère son binôme du jour d’un air faussement épouvanté puis le regarde éclater de rire et il le suit de bon cœur dans ce craquage.

Il se met à rire, lui aussi, à rire pour évacuer la tension, à rire pour ne plus penser à tout ce qui le tourmente dans les parages d’Eliott, à rire de sa propre stupidité, à rire de son comportement franchement pas toujours au top avec ce « jeune » de dix ans son cadet pour qui il entretient du désir, de la frustration et peut-être un peu plus. Avec ces blagues échangées, Wes sent son cœur se serrer, parce qu’il ne l’en trouve que plus désirable. Quelqu’un capable de lui répondre du tac au tac de cette manière ? Il craque. Et il le déteste un peu plus, à la fois. C’est vraiment injuste, ces gens qui ont tout : la beauté et la personnalité. Comment est-il supposé lui résister ?

Il se redresse alors, assis sur le lit, le dos tourné à Eliott parce qu’il est terriblement beau quand il rit et ça lui fait presque mal physiquement. Il commence à parler, à dire des bêtises, sur un débit trop rapide :

— Damn we absolutely need to organize a contest when we’ll come back to Detroit. A daily “worst joke ever” contest or “stupidest joke ever” or maybe we could decide daily theme or weekly theme, will be awesome!

Ce qui impliquerait qu’ils se parlent tous les jours là où Wesley prenait soin de l’éviter dés qu’il le pouvait sans trop attirer l’attention. Est-ce qu’Eliott l’avait remarqué ? Doit-il lui en parler ? Il a le sentiment de revenir à ses années de lycée. Il se sent gauche, gêné. D’un autre côté, Lloyd a été clair sur bien des points juste avant alors pourquoi s’humilier ? Son envie de l’embrasser finira par passer. Il enchaine en reprenant à peine son souffle :

— Not sure who win this round. We need an impartial judge so not Archie of course but who… Oh, no, better! The winner will be the one who make the other laugh? And if we both success we both have the point?

Wesley aime inventer des jeux stupides et les règles qui vont avec. Il aime aussi, apparemment, se saboter tout seul et se mettre des bâtons dans ses propres roues.

— So I’m hungry I’m going to hunt something, did you want a snack or something?

Tentative de fuite. D’un autre côté, dans la philosophie de Wesley, manger, ce n’est jamais une mauvaise idée. Il aurait dû juste vérifier qu’il n’y avait pas de room service mais il n’y pense qu’en avisant le téléphone à côté de la tête du lit, et il se maudit intérieurement.