sanctuaire : Southwest. Un petit appartement de trois pièces bien entretenu et décoré avec un certain goût épuré. La propreté est de mise dans ce lieu sacré et affectionné.
ombres et névroses : Le corps, ce sanctuaire béni, est accentué par les cicatrices du passé et du présent. Les traumatismes s’effacent tandis que les marques persistent. L’encre noire effleure les courbes de cette chair irlandaise. L’esprit est sain.
Silence assourdissant. Les lumières jaunes éclairent faiblement les lieux. Ni trop tard, ni trop tôt. Les derniers gants se fracassent contre le sol. La transpiration se mélange aux quelques gouttes de sang qui ont perlé. Actes de violence pour relâcher la pression. La perte de contrôle est inévitable. L’égo l’emporte souvent sur les règles établies. Il n’est pas question de gagner, il n’y a pas de victoire ici. Seulement des âmes en recherche d’une souffrance passagère pour se sentir en vie ou se punir. Les quelques bleus et plaies suintantes apportent ce plaisir éphémère aux êtres ébranlés. Chacun amène sa rage sur le ring, enroule les bandages pour protéger les os déjà fragilisés et se mesure à son adversaire. L’humanité y est abandonnée. La corde autour du cou a été arrachée, il ne reste plus que des animaux indomptables à la volonté inarrêtable.
Il le perçoit lorsqu’il pénètre dans la salle. Ses poumons se remplissent de cette colère qui a tâché les moindres recoins de la pièce. Un léger malaise s’installe progressivement. Il n’est pas dans son élément. La brutalité, il la côtoie, mais il n’est jamais celui qui l’instigue. Il a promis, il y a longtemps de ça, qu’il servirait les démunis et les moins chanceux. Sa main a effleuré le papier sacré et il a prononcé le serment irrévocable. Il les sauvera et ne causera aucune peine. Mais, c’est faux, n’est-ce pas ? Les images du passé reviennent perturber ses pensées de jour comme de nuit. Impossible à oublier. Fracturé en deux, son cœur bat pour les volatiles et pour les êtres errants à Détroit, piéger malgré eux. Ils brûlent au centre de ces flammes qui ravagent cette ville. Ils ne sont que des pions, bientôt de cendres, qui admirent leurs destinées partir en fumée.
Le sac est jeté à terre, un sourire poli accueille les personnes quittant l’endroit, un mouvement de tête pour saluer le coach qui range le matériel. Il a troqué son long manteau et sa chemise pour des vêtements plus confortables. Son azur se perd sur les tableaux et prix qui ornent les murs. Il observe longuement les sacs de frappe. Il divague. Il pense à mille et une chose sans vraiment pouvoir se concentrer sur une seule. Cet entraînement avec Lorcan serait, sans doute, un bon moyen de mettre en pause son cerveau rien qu’un instant. Il bourdonne, continuellement. Un sifflement perpétuel qui l’agresse et le torture. Comme des aiguilles qui perforent sa chair. Laissant derrière les marques d’un naufrage. La violence n’est jamais la réponse, mais si elle l’était cette fois-ci ?
Il s’assied sur le bord du ring, les bras croisés, le visage fermé. Un bruit métallique de clés attire son attention. Un vieil homme s’approche avec une serpillière. « Les gens n’ont pas tendance à laisser beaucoup de sang derrière eux la première fois. » Son commentaire réussit à arracher un sourire sur les lèvres de Charlie. « Il y a une première fois à tout. » L’exception à la règle. Il connaît O’Connell, il le connaît bien, il n’est pas doux. Quelque chose brûle à l’intérieur de lui. Il est amer. Acide. Un danger pour lui-même et les autres. Son sang bouillonne.
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