Some Infinities are bigger than other Infinities | Archie & Elsa

Janvier c’est de la merde, voilà. Le désert après une période de “fête”, il fait moche, il fait nuit, et on attend rien. En tout cas, on avait rien à espérer à part Février, ou pire, Mars, sans parler d’Avril. Archie n’aimait pas le mois de Janvier, et la vie avait décidé de lui donner une raison de plus. Après, il s’était donné la raison tout seul, si on y réfléchissait bien. Entre autre parce que ça faisait des mois qu’il se promenait avec la fameuse épée de Damoclès au-dessus de ses boucles redevenues brunes à un moment. Des soirées à se planquer chez Kit et Kenneth ou chez Elsa, juste parce que son petit cœur savait quelque chose que sa tête ne voulait pas accepter. Ou l’inverse, en vrai. Mais une réalité, qu’il avait vu venir dès le début, en fait, la réalité que malgré tout l’amour du monde pour Sosthène et pour Aaron, il devenait un peu fou. Et bonjour pour se l’expliquer. Pour mettre des mots dessus, pour vraiment comprendre pourquoi. Il avait tout. Il avait les hommes, le couple, le boulot, les amis, la famille, alors comment t’expliques d’être incapable de se sentir heureux? Archie, en grand roi de l’art de fermer les yeux, avait juste prit la technique de la fuite. Mais ni Aaron, ni Sosthène n’était dupe. Quoi que, Sosthène et lui étant du même combat… C’est d’abord Aaron qui avait fini par le confronter la veille. Et finalement Archie avait craqué, ils s’étaient décidés à mettre fin à leur trouple. Pas à leur amitié, bien qu’il faudrait un peu de temps, mais ça ne s’était pas si mal passé que ça. Le pire datait de quelques heures plus tôt. Le pire avait été de parler à Sosthène. Le lien était différent, et leur relation toujours plus extrême, alors bien sur que le choc de l’annonce avait résulté dans des cris et peu de logique. Archie en était reparti un peu engourdi. Pas d’idée d’où aller, ou d’à qui parler. Le hasard voulu qu’un de ses amis de lycée lui propose d’aller boire un verre, alors il avait suivi. On a jamais dit qu’Archie était le prince de la bonne idée, c’était plutôt le Schumacher de l’autoroute de la mauvaise idée. Comme aller se torcher à la vodka dans un bar avec un pote innocent de l’état de McArthur… Et 1h du matin devant la maison familiale à essayer d’ouvrir la porte avec les mauvaises clés.   “Elle a changé la serrure ou quoi!!!” Il râle tout seul, finit par sonner, tant pis si ça fait hurler le chien et probablement sa soeur qui va venir lui casser la figure en personne. Mais il a froid lui, il est dehors avec un petit pull et son seum.
“Elsaaaaaaaaaa j’ai froiiiiiiiid”  

La sonnette a retenti à peu près six fois dans son esprit. Mauvaise idée d’appuyer dessus vu qu'apparemment il est à la fois beurré et à la fois déjà en gueule de bois. Il regarde sa sœur qui ouvre la porte. “Pas quand tout est froid!” Il dit, parce que dans son cerveau à lui, ça a du sens. Mais tout est froid, et pas juste la température. Il avance pas bien droit jusqu'à l’intérieur de la maison, ça pourrait faire du bien d’être quelque part qu’il connaît, s'il voyait pas Sos’ un peu partout ici. Aaron plus récemment, bien sur, mais Sos était partout dans les murs. Sur le canapé, dans la cuisine. “Ah” qu’il répond concernant les clés. Bah, tant pis. Faut dire qu’il avait beaucoup de trousseau de clés. Il avance vers la cuisine. Où il se voit faire des nuggets surgelé à Sos’ le jour où il lui a annoncé son CDI, ou faire à café à Aaron un matin où Kenneth était là à embêter ce pauvre Jenkins.
“Oui, c’est bien un truc à manger.” Il dit, la voix un peu faible, alors qu’Elsa lui tourne le dos. Il remarque, ou non, que ses joues sont mouillées. En fait, il les sent, mais son cerveau est trop empoisonné pour réaliser qu’il pleure pour de bon. “Pas des nuggets…” qu’il ajoute avec un hoquet. C’est quand même fou ça, de pleurer pour sa propre décision. Nan mais, c’était lui le méchant, il pouvait pas agir comme si on venait de tuer son chien. Il essuie sa joue de la manche de son pull. Si il y avait une voix quelque part pour essayer de le convaincre que c’était la bonne décision, que quand le choc sera passé, Sosthène lui reviendra (ce qu’il avait dit lui-même quelque part dans la dispute), que d’ici quelques mois, tout irait mieux… Ouais, cette voix avait disparu. Introuvable au bataillon, noyée sous la vodka et la haine de lui-même.

Est-ce qu’il veut lui raconter? Oui, chaque détail, tout ce qu’il s’était passé en deux jours. Et en même temps… Non, pas du tout, parce qu’il ne veut pas y penser. Ce qui et stupide puisque c’était tout ce qui lui tournait dans la tête. Et de toute façon, hein, tout raconter comment, avec le hoquet et les larmes de crocodiles? Archie se demandait souvent quand il arrêterait d’être un petit garçon. Clairement pas ce soir. Mais un jour, ce serait bien. Arrêter de squatter chez les autres, par exemple, ce serait un bon début. La seule chose qui avait compté jusqu’ici c’était d’avancer dans sa carrière et passer du temps avec Sosthène et Aaron, mais même cette relation là n’avait rien eu de bien mature.
Les sentiments étaient réels, ça, oui. Assez pour qu’il ne se sente aussi mal à cet instant précis. Et donc, tout ça pour dire quoi? Pour dire que c’est un ”Hmui..” qui lui échappe, mais pas plus, parce que sa gorge est serrée et qu’il est encore en train d’essayer de calmer ses larmes. Il souffle un peu du nez à la mention du plat choisit et de l’ajout de fromage possible. “Y’a jamais trop de fromage…” Surtout pas quand le monstre en face était Archie, qui apparemment n’avait pas de soucis de gorge serrée quand il est question de parler bouffe. Ses yeux se baissent sur le chien venu lui lécher gentiment la main, il se baisse donc pour aller le saluer plus proprement aussi. “On s’est séparé…”  Il finit par souffler en s’essuyant les yeux avec sa manche, les relevant finalement vers Elsa. “Fin… je… pas on…” Il ajoute finalement assis par terre avec le chien qui s’allonge de 10% sur lui, étant gigantesque. Il ne veut pas qu’Elsa pense que les deux autres sont coupables, alors que c’est lui le vilain de l’histoire, qu’il soit en larmes sur son carrelage ou non.

T’as… rompu. Il a l’impression de revivre ses deux derniers jours à nouveau, rien qu’à entendre Elsa le dire à haute voix. Il baisse la tête en caressant Wallace. Rien à ajouter à ça. Ouais. Il avait rompu. C’est mignon un chien didonc. Ah, Tiny… Tiny allait être tellement confus de ne plus voir ses deux autres papa hein? Non, ne pas penser à ça, il sent les larmes qui reviennent. Il est distrait pas la question de sa soeur sur les sentiments et fait “non” de la tête. Pas du tout. Il aimait toujours aussi fort les deux autres, en soit. Mais pas exactement comme il faudrait, peut-être? Et pas assez pour continuer à les voir dans leur trouple. Il ne voit pas l’avenir de cette relation, et il ne voit pas son avenir non plus. Sauf que, même maintenant qu’il était officiellement célibataire, bah, il était pas certain de voir l’avenir non plus. Est-ce qu’il voulait juste vieillir seul? Pas tellement. Mais une relation? Il ne savait clairement pas en prendre soin non plus.
“Je… je sais pas… Que j’y pense vraiment… deux jours?” Il avait eu des signes avant, certes. Ca se comptait en mois,  sans doute, mais jamais il ne s’était mit en face du fait, jamais n’avait-il eu la conversation, même entre lui et sa propre personne. Il avait fallut qu’Aaron ait le courage de le forcer à parler, pour que tout s'enclenche d’un coup. “Sos’ était très fâché.”  qu’il dit avant que les robinets ne se réenclenche et que les larmes retrouvent leur chemin sur ses joues. On aurait vraiment dit qu’il avait 6 ans et qu’il avait cassé une poupée à Sosthène par erreur, hein. C’était ce genre de niveau de larme de crocodiles, quand à l’époque il aurait aussi pu se persuader que sa moitié n’accepte plus jamais de lui parler, en gros.

Il se laisse aller contre Elsa, la tête sur son épaule. Entre elle et Wallace, le sol de la cuisine n’est pas le plus confortable mais ça lui suffit pour le moment. Il ne veut pas grand chose et l’alcool est toujours très présent dans ses veines, l’alcool et les larmes. Il sait bien qu’Elsa fait sens quelque part ici mais rien n’a de direction là tout de suite dans son esprit. “Ca va tout changer…” Il le sait parfaitement, parce que même dans un monde où Sosthène accepte de lui parler à nouveau, qu’est-il supposé faire? Ils vont se dire quoi? Et comment ça sera d’être autour de Sosthène, à ses côtés, après ce qu’ils ont trouvé et perdu ensemble? Ça lui donne le vertige. Il se recule un peu et se redresse doucement, arrive à peu prêt à se remettre sur ses deux jambes.
“J’vais m’doucher…” Il dit en s’essuyant les yeux avec sa manche. “Et dormir… sauf si ma chambre est devenue.. Une salle de sport…” Il a un hoquet de rire qui se mêle à un hoquet de larme. Mais il est certain qu’il n’y aura pas grand chose de plus à tirer de lui pour ce soir. A part plus de larme. Peut-être qu’il a encore de quoi fumer un joint planqué dans un tiroir et il espère que ça l’aidera à dormir correctement. A se calmer, aussi, à éviter de se prendre une crise d’angoisse en plus du reste. Il s’apprête à avancer avant de réaliser qu’il y avait une histoire de nourriture avant tout le reste, et ses yeux se tournent vers le four. ”Vais p’t’être mangé avant… En fait…” Son estomac ne le trahira absolument jamais, c’est déjà ça. Il ne fait pas l’erreur d’essayer de manipuler un four cependant et va juste s’asseoir à la table de la cuisine.

Spécialité familiale dont il aurait bien voulu se débarrasser. Les MacArthur avaient assez donné dans le changement et l’adaptation. La réaction, voilà, leur spécialité. De réagir quand quelque chose se passe, mais jamais d’agir pour empêcher. En même temps, il ne sait pas tellement comment il aurait pu agir ici. Et son cerveau n’est absolument pas en état pour y réfléchir trop, là. Il venait à peine de se souvenir que de la nourriture l’attendait.
“Pourtant ça ferait pas de mal… A toi ou la maison.” Il marmonne en passant son indexe sur une griffure dans la table qu’il a faite lui-même à 9 ans lors d’une dispute avec Lorna. Cette maison était vieille, et une capsule temporelle. De tous leurs mauvais souvenirs certes, mais aussi de tous les bons. Et même les bons lui semblent insurmontables.
Il n’a pas tort cependant, que de rénover pourrait tous les aider à avancer. Peut-être que c’était là qu’ils pourraient agir avant de réagir. Faire quelque chose de positif. Bien qu’Archie soit absolument contre la vente de cette maison, rien n’empêchait de changer les meubles et repeindre les murs. Son attention est tournée vers l’odeur et l’assiette mise devant lui. Il attrape son couvert et la remercie avant de se mettre à manger. Il sait qu’il aura toujours un toit ici et pour le moment il semblerait bien qu’il allait l’utiliser. Mais pour combien de temps? Pas certain encore. Il ne sait pas ce qu’il veut, et encore moins avec tout l’alcool qu’il a dans le sang ce soir. Il pouvait au moins se concentrer sur ce qui faisait un sens absolu dans son état actuel: finir la moindre miette de son assiette, aller se coucher, et récupérer Tiny demain qui, dieu merci, était chez Kit et Kenneth - dans son studio attitré, Kit ne s’occupait absolument pas du chien et était déjà bien gentil de l’accepter dans son périmètre.