agents of chaos (harlow)

Allongé sur ton lit, du rap qui raisonne dans toute la pièce, le joint sur lequel tu tires ne suffit pas à apaiser l'esprit. Des bouffées de cannabis qui s'échappent de tes lèvres, avec toujours ce même désir de retarder la bombe qui menace d'imploser entre tes côtes.  Ou au cœur de ta cage thoracique. Qu'importe où elle se situe exactement, tu la sens gronder chaque fois que le compte à rebours se rapproche un peu plus de zéro. Comme une gangrène que t'arriverais pas à soigner. C'est à coups de tout ce qu'il existe de toxique que tu cherches ta kétamine. Ta drogue. Ton vice. Cet attrait pour la destruction a porté bon nombre de noms au cours de ton existence, si bien que même toi tu ne pourrais aujourd'hui le définir. Des journées qui se ressemblent, qui pèsent, qui t'enlisent dans un quotidien dont tu n'es plus sûr de vouloir. Dans ton appartement miteux de Southwest, il a plus de boites de carton de pizzas que de mobilier. Des canettes de bières qui s'entassent, collection morbide qui n'est que symbole de la dépravation dans laquelle tu te complais. Ou du moins, dans laquelle tu te complaisais. Et si maintenant tu voulais plus ? Pas seulement être un corbeau bien docile. Pas seulement être un bandit qui s'abreuve d'adrénaline. Pas seulement cet homme qui séduit pour combler un vide qu'aucune d'elles ne saurait remplir. Sauf une. Sauf elle. Autre piliers de tes tourments, autre drogue dont tu peux plus te passer. Nature qui pousse à l'addiction. Qui pousse à l'obsession. Jamais de demi-mesure, toujours dans l'extrême. Vie qui va trop vite. Mort qui attend à chaque tournant. Avant, tu pensais que tu voulais absolument crever jeune, aujourd'hui, t'es terrorisé à l'idée que le souhait puisse se concrétiser.

Difficile de trouver sa place quand l'on est pas certain de savoir ce qu'on veut. Assis au bar à attendre ce camarade qui n'en est peut-être plus un, tu contemples la plèbe s'adonner à la drague et aux jeux d'alcool sans y prendre part. Têtes légères, sourires faciles, parfois, tu leur envies cette normalité. Un péché qui n'est que le premier des six autres que tu traînes, tableau peu reluisant qui fait honte au tout puissant. Un dieu que tu pries sans conviction, conscient d'être un hypocrite qui cherche à se faire pardonner des fautes qu'il s'empressera de recommencer à peine les pieds hors du lieu sacré. Alléger une conscience qui en vérité n'a aucune chance de rédemption. Ça, c'est pour ceux qui méritent leur place au paradis, pas déjà destinés à pourrir au purgatoire. Harlow. Dégaine de motard qui se fraye un chemin jusqu'à toi. Démon qui partage ton amour de la vitesse et des sacs de boxe qui encaissent. Jadis quelqu'un avec qui tu aimais refaire le monde ou des portraits. Maintenant, tu sais plus bien sur quel pied danser. Tu veux pas être le premier à jeter au feu votre amitié, mais t'es pas prêt pour autant à lui accorder cette confiance que tu ne lui avais même pas officiellement donnée. Plus que jamais méfiant de tous, et surtout de ceux qui sont proches de toi. Les lames plantées dans le dos sont les plus efficaces, les plus douloureuses, celles qui ne ratent pas. Et tu ne comptes pas laisser cette occasion à qui que ce soit. « Tu bois quoi ? C'est moi qui offre la première tournée. » C'est ta façon de l'accueillir, sans te lever de ton siège, latence dans les facultés sociales. Et t'as pas de temps à perdre. Tu veux secouer cette nuit. Tu veux propager ton chaos parce qu'il n'y a que quand tout brûle autour de toi que tu te sens bien. Quand les flammes que t'allumes viennent te consumer.

( Pando )