Angel is the Devil | Kadeuce

Soupçon de paix, accalmie improbable qu'il s'affaire à faire subsister. Il s'est déplacé, il a accepté ; service à rendre pour la sœur qu'il décevait ; celle qui tente encore de composer avec les idées qu'il refuse de lâcher. La stupidité. La détermination à suivre des sentiers houleux, terreux ; cendreux en vérité. Une ligne vers la mort. Un chemin vers les profondeurs où attend sagement le rappel de ses nombreux torts. Kadeuce pourtant réanimé derrière les séquelles qu'il porte, les maux qui l'infectent et contre lesquels il ne cherche plus à batailler. L'évidence, le sort acté. Sa destinée, aussi triste soit-elle ; il savait dans quoi il s'engageait. Un souffle discret, une inspiration prise pour offrir comme un répit aux poumons malmenés. Il s'en remet pourtant aux viles habitudes, les phalanges qui accueillent l'une des cigarettes fraîchement roulées. Toxicité à laquelle il s'enivre, l'idiot, tout en sachant les secondes comptées désormais avant que cette sœur n'en vienne à se dévoiler. Mais pas une ombre, pas un mot lancé. Pas une note pour défaire ce presque silence qui s'est installé. Rien que les sourcils qui se froncent, rien que ce temps qui passe, que ces minutes qui s'écoulent jusqu'à l'appel lancé. Occupée, la demoiselle. Occupée en ces lieux qu'il ne tenait pas à approcher. Il y a cette vague de souvenirs qui s'y joint, comme un relent du passé qui s'immisce jusqu'à tout calciner. Une pression à l'endocarde, plus encore sous cette requête poussée. Qu'il s'approche, qu'il quitte cette place qu'il s'était trouvé. Qu'il gravisse les hauteurs des bâtiments guettés ; rien qu'un instant, pour des clés que les phalanges ont instinctivement resserrées. Il a soupiré, mais il a accepté. Au nom de cette paix, au nom de ce calme qu'ils essaient de faire tenir. Il a accepté, Porter, bien que les traits se soient brièvement abaissées. Elle est remarquée, pourtant, cette hauteur. Elle impose son ombre dans les corridors à mesure qu'il s'enfonce là où l'air est froid, nauséabond ; pour l'âme qui se souvient de tout ce qui a pu se jouer. Il y avait le parfum de la mort qui s'avançait, il y avait ce spectre encapuchonnée qui guettait. Entre la vie et la mort, l'homme qui aujourd'hui circule en essayant de se dépêcher. Et il a juré, Kadeuce, quand enfin la prunelle unique parvient à s'y poser. Elle est là, elle le rejoint ; et lui, il est prêt à cracher ce non-plaisir qui l'enveloppe d'avoir dû se risquer là où ce qu'il avait été avant cet effroyable deuil encore porté ne succombe aux blessures que rien n'a effacé. Il renaissait l'esprit lourd, Kadeuce, entre les murs froids de ces lieux méprisés. Il revenait à la vie, pour entendre les tristes nouvelles qui concernaient un autre qu'il n'a pas su protéger. Ce frère exécuté quand lui agonisait. La mémoire tremble, mais l'attention se pose ailleurs. Les souvenirs s'éveillent, avant que les présentations ne finissent par s'imposer.

Un geste de la tête, un hochement léger pour saluer ceux désignés.
Mais la suite, mais les pas qu'il en vient à suivre dans la foulée.
Cette distance qui se creuse encore entre lui et cette issue passée.
Le piège qui lentement se referme, qui emprisonne les chairs fatiguées.
Kadeuce qu'elle parvient encore à berner.
Lung specialist.
Le regard qui va et vient, paumé.
Thank you for agreeing to meet him.
Sentence vient de tomber.
Le leurre a fonctionné.

Il allait pour répliquer avant que la toux ne revienne. Puissante, violente. Elle serre la trachée, elle condamne les paroles qu'il aurait pu vouloir cracher. Un silence strident qui accompagne les maux tandis que la main se lève, avertissant quiconque essaierait de l'approcher. Rien qu'un instant, rien qu'un moment pour mieux se redresser. Il prend sur lui, il lutte contre tout ce qui peut lentement l'asphyxier. « Wha'... I didn't ask for anything, alright ? Sorry, mate, but ya're losing yar time here. Pour cet intrus qu'il n'a qu'à peine confronter, la sœur vers qui il finit par revenir, le poignet qu'il saisit pour un peu plus l'éloigner. Wha' the fuck is that ? » Oh, il sait, il a déjà compris le plan – il n'a fait que suivre la ligne directrice de toute cette organisation. Elle a pris les devants, lui n'a fait qu'être téméraire et insouciant. « I'm fine, ok ? I'm fuckin' fine and I don't need to see that prick here. » La voix basse pour atténuer les mots, pour taire la manière dont il peut s'emballer. Soupçon de terreur d'avoir à rester plus longtemps en ces corridors tristes et fades ; once de colère, envers lui-même plus qu'envers elle, de s'être ainsi laissé si aisément guider. Il aurait dû l'appréhender, il aurait dû savoir ; ce n'était qu'une question de temps avant qu'elle ne se décide à s'en mêler. Il aurait dû savoir, Porter, que sa venue en ces lieux mènerait forcément à cette issue. « I can take care of maself. » Pour en finir avec ce tour qu'elle essayait d'orchestrer. Pour en finir avec tout ce qu'elle pensait pouvoir entreprendre quant à cette vie qu'il sait menacer. Il a trop fait traîner ces parasites pour espérer qu'ils ne s'estompent avec le temps ; mais il avait accepté son sort, Kadeuce, ne serait-ce que de moitié. Un juste retour des choses pour ses actes inconscients et cette vengeance teintée de stupidité. « Ya can go back to wha' ya've to do, man. Really. » Il s'y essaie, un dernier élan pour clore le sujet d'un mal qui s'est mis à le ronger. Prêt à partir, prêt à se défaire d'une aura trop lourde qui, depuis son arrivée, s'est installée sur ses épaules sans qu'il ne puisse réellement y parer.  
                      

Congédié, l'abruti qui guettait. Congédié pour que les mots ne restent qu'entre eux, pour que cette plaie puisse enfin entendre raison ; accepter le sort de l'idiot qui choisit de l'accepter. C'était son erreur et cette sentence est sienne. Borné, la culpabilité qui réclame les maux qui lui sont infligés ; quoi qu'encore trop tendres, trop paisibles pour cet échec qu'il a essuyé. Il allait pour insister, l'homme, mais il s'y tient, ce regard. Elle toise et elle observe. Elle s'attarde sur lui comme d'autres l'ont déjà fait. Il croit pouvoir en lire les éclats, ces étincelles brisées. Ces parcelles éparses qui témoignent d'une peur qui commence à se solidifier. Celle qui éclate sous les mots crachés, le silence qu'elle réclame pour mieux s'imposer. Il a tiqué, juré. Il a tiqué, Kadeuce, osant un pas en arrière comme il se sent déjà dépassé. La trachée qui brûle sous les toux ravalées. Les poumons qui suintent ce manque d'air à l'en faire tressauter. Elle ne sait pas, qu'elle dit. Elle ne comprend pas ; et le sourire est ironique qui sur les pulpeuses s'installent. Il pourrait s'élancer, cracher la vérité. Sort qu'il se doit d'endurer puisqu'il n'a pas su protéger celui qu'ils ont perdu quand lui s'effondrait. La vengeance qu'il n'a pas su faire régner – manquement aux promesses maintes et maintes fois clamées. « I’m sorry I had to use such extreme lever but... ; prêt à répliquer. Les lèvres qui se scellent et les traits qui se ferment. Il veut lui dire de s'arrêter là, il ne vient entendre de plus. L'éclat au regard a changé, plus insistant, plus noir encore de ces émotions qu'il n'en peut plus lui-même de porter. Qu'elle se taise, mais les notes bravent les lippes quand ses paupières finissent de se fermer. I will never be the one to tell your daughter that her daddy died because he was such a dumbass he refused the help. » Il l'a imaginé, cet instant. Il a rêvé, parfois, cette tristesse qui aurait à s'installer, le silence des murs dans lesquels il s'est finalement installé. Cette petite âme délaissée, rendue à la solitude d'antan parce qu'il a failli, parce qu'il n'a rien honoré. Ni les promesses envers le défunt frère, ni celles qu'il lui aurait concédé. Le cœur en sursaute, la toux s'importe entre autre. Et s'il lutte contre lui-même et cette mémoire qui n'a rien effacé, le regard que Cat porte sur lui parvient à le heurter. Inquiétude gronde qu'il ne parvient pas à encaisser. Inquiétude s'élance jusqu'à tout surplomber. L'adorée citée, la mère dans la foulée. Comme autant de liens qui tiennent encore pour lui offrir ces raisons de prospérer. Éclaircies tenaces dans la pénitence grisée qu'il tenait à honorer. Jusqu'au contact qu'elle fait régner. Jusqu'à cette proximité rappelée pour tout accentuer. « Don’t you think we’ve all suffered enough ? Please… » Plainte qui hante, qui résonne en lui comme une litanie infernale. Plainte qui hante, qui terrasse toutes les certitudes derrière lesquelles il se cachait, en proie à un trop risible mal.

Un soupir pour palier au silence, à la réponse qui tarde.

Un soupir tandis qu'il jure, Kadeuce. Un pas en arrière pour essayer de réfléchir, pour encaisser ce qu'elle vient de prononcer. La raison qui ne peut rien nier, qui accorde avec sincérité son soutien envers les paroles qui lui ont été distribuées. Elle a raison, la sœur adorée. Elle a raison parce qu'ils ont déjà trop vu, trop vécu de tourments insensés. Ils ont trop souffert pour risquer d'encore avoir à ployer. « Fuck. » Parce qu'il ne peut pas reculer, tourner le dos et s'en aller. Parce qu'il a en tête les traits de cette fille qu'il apprend encore à apprivoiser, de cette femme à laquelle le cœur s'est damné. Cette mère déjà terrassée par la perte d'un fils qui ne s'en relèverait pas s'il venait à s'effondrer. Et elle, elle que la prunelle encore fonctionnelle peut observer. Elle qui lutte contre tant de démons, tant de poison. Elle qui tient encore sa promesse de veiller sur cette vieille carcasse abîmée. Il a juré, Kadeuce, pour essayer de souffler avant de céder ; ou presque. En partie. « Ya couldn't understand why anyway, hey. » Comment le pourrait-elle ? L'esprit est fermé qui refuse d'avoir à se confier, l'insistance de cette culpabilité dépasse l'entendement comme il sait que ces tragédies se sont succédé à cause de ses méfaits. Responsable qui ne peut que souffrir pour se racheter ; et finalement, vivre est une sentence de choix quand il aurait voulu que les sorts soient échangés. « Fine. » Il ne lui offre que cette réussite, Porter premier. Il ne lui offre que cette acceptation puisque les syllabes qu'elle lui claquait viennent de trop bien s'imprimer.   
                      

Complainte résonne dans l'esprit – effroyable litanie pour hanter les songes sur une année. Elle a supplié, en partie. Elle a supposé la fin qu'il espérait, les conséquences de l'absence qu'il aurait à imposer. Elle a forcé l'âme à s'y perdre, imageant les larmes de la gamine qu'il n'a déjà pas vu grandir – qu'il pourrait de nouveau abandonner. Comme il l'a fait avec cette sœur que le destin éloigné, derrière des barreaux qu'il se retrouvait à ruminer sur cette loyauté empoignée et honorée, sur tout ce qu'il aurait à conter lorsque liberté lui serait rendue. Il a tiqué, Porter, abandonnant les armes – délaissant les remparts derrière lesquels il se tenait. Portes ouvertes aux volontés qu'il ne peut qu'exaucer, même malgré la culpabilité – il mérite ce sort qui lui a été infligé. Il le mérite, pour tous les maux qu'il ne cesse de leur insuffler. Et s'il s'y résigne, sans un sourire, le sien à elle s'élargit jusqu'à tout illuminer. De perdant à gagnant, ou presque. Il s'y laisse traîner, à contre cœur – les poumons de toute évidence compressée. La toux menace qu'il retient, qu'il ravale ; qu'il essaie de surpasser. Comme si ça pouvait cacher les réels maux, mais il n'est pas idiot. Peu importe les efforts et les espoirs, cet abruti qui les observe révélera tout ce qu'il parviendra à trouver. Les restes de métal qu'ils n'ont pas pu lui enlever, les cellules mortes sous les toxicités qu'il ne cesse de consumer – les infections qui condamnent peu à peu la trachée et les poumons gonflés. Il a soupiré, Kadeuce, retenant tout ce qu'il aurait à ajouter. Il se laisse bercer par les couleurs retrouvées par le faciès de cette sœur qui s'impatiente, qui essaie de tenir sa place malgré les examens plus rapides que ceux imaginés. Promesse qu'on lui permet d'honorer ; il râle déjà quand hauteur peut être récupérée. Son regard, il ne le pose même pas sur celui qui n'hésite pas à s'avancer. Il n'écoute que de moitié. Mensonges. Il écoute avec attention, papier qu'il lui tend que les phalanges récupèrent pour l'enfoncer dans une poche déjà bien remplie. Du repos, de la flotte ; la possibilité de soin supplémentaire. Il a laissé un rire s'échapper d'entre ses lèvres, les phalanges qui se portent instinctivement à la cicatrice qui y réside, là, à la joue qu'on trouait. Les marques sont nombreuses sur lesquelles il sent tout de même la curiosité de cet homme là se porter. « Yeah, that's ma type of things. » Ironique, et pourtant il le voit commencer à s'éloigner. « Hey, it was a joke. I don't want that shit, I've what I need. » Un peu plus de poison pour défaire les tensions, les maux qui auraient à subsister. Médicament contradictoire avec le fait que les poumons soient heurtés. Veste réajustée, les pas déjà orchestrés. Il s'est approché de la sœur, cet air maladroitement sévère sur les traits malmenés. Il observe, il le voit clairement cette espèce de sourire qui persiste à vouloir se dessiner. « Ya can say it, ya win. Happy ? » Et il jure encore, l'idiot. Il jure sans prêter attention à celui qu'elle dérangeait pour son cas – rien qu'il ne lui laisse, puisque la volonté était toute autre que ces examens essuyés. « C'mon, I need a smoke and ya did yar number today. Ya saved a life, blablabla... » La main qu'il lève en s'éloignant, la toux qui reprend, mais qu'il essaie de maîtriser. Les pas qu'il laisse continuer, le souffle qui manque – mais fierté refuse que pause lui soit accordée. « Not... Semblant d'inspiration sifflante qu'il cherche à s'approprier, le cœur qui persiste à s'emballer. Not a word to Erin. » Pour seul ordre qu'il parvient à partager. Le silence quant à cet état dont il essaie vainement de les préserver, l'adorée et cette petite fille qu'il ne tient pas à inquiéter. S'il savait.    
                      

C'est l'appréhension qui reste, la peur de l'avenir. C'est l'appréhension qui guette, elle surplombe les songes jusqu'à tout écraser – un poids qui pèse sur l'encéphale, sur tous les choix qu'il aurait encore à faire. Méritant qu'on le dit, illégitime qu'il se pense. En plein vortex, au cœur du maelstrom de cette bataille livrée sans merci. Les doutes assaillent, approfondissent les plaies qu'il osait espérer guérir. Il ne sait pas, ne sait plus ; reconnaissant pour la détermination de cette sœur devenue fourbe, méprisant de cette volonté de le sauver malgré les marques aux paumes, le sang qu'on devine sur ses phalanges usées. Il a failli, il y a des années. Il a failli, mais la vie persiste à le récompenser, comme pour apaiser les murmures qui gangrènent l'âme désolée. Il a failli, et pourtant. Il marche, tente encore de respirer. Il suit les lignes qui mènent vers ces extérieurs pollués, vers ces pavés noircis par la pourriture qui continue de les teinter. Il supplie le silence, il réclame à ce qu'il soit gardé quant à tout ce qui continue de le faire ployer. Cette bataille doit être sienne, quiétude doit encore les envelopper. La prunelle qui contemple alors cette silhouette qui observe, les yeux levés. Les sourcils froncés, compréhension soudaine qui en vient à le faire soupirer. Il aurait dû s'en douter, surnageait dans cette espèce de triste cécité. Il pensait pouvoir les préserver, ne faisait que tout accentuer. « C’mon, you really thought I came up with this plan by myself ? Un soupir. Rien qu'une plainte légère dans ces sifflements désordonnés. La trachée délaisse ce maigre grognement, cette plainte presque silencieuse quant à l'implication de l'adorée. I really don’t understand how people can think you’re smarter than me sometimes. » Il aurait pu en rire, s'en abstient de part les obstacles qui l'empêchent d'encore correctement respirer. Il aurait pu en rire, Porter premier, mais il craint les séquelles de cette inquiétude sur celle qui peine déjà à se relever. « Yeah... I don't know. » Aveugle qu'il fut, aveugle qu'il est depuis bien des mois en vérité. La vue troublée par cette vengeance qui en appelle à sa gloire, qui réclame d'être assouvie. Sa vision déformée, à l'ancien, parce qu'il se noie parfois aux regrets en ignorant alors tout ce qu'il est en mesure de désormais pleinement s'approprier. Il se perdait, Kadeuce, avant de constater cette lumière et de la voir lui demeurer. « Coffee ? » L'air est faible qui lui parvient, la paume discrètement portée à la poitrine. Il hésite, il tique. « I've to... » Mais le regard lui revient, s'attarde sur cette jeune sœur qu'il retrouve peu à peu – comme si les temps, enfin, étaient voués à changer. « Yeah, why not. » À quoi bon lui en vouloir pour cette inquiétude et ce piège dans lequel elle l'entraînait ; elle n'a jamais fait que suivre ses instincts, poussée par une lumière qui lui échappe. Elle est la beauté qui manque aux aubes. Elle est cet espoir qui s'étiolait, avant d'avoir à pleinement irradier.

Il ne fait qu'un peu plus y succomber.

Mais le silence perdure, comme un poids sur cette cage de taule qui grince, grésille à l'étage annoncée. Dans l'esprit se joue ces tristes souvenirs, le rappel de cet entre vie dans lequel on l'avait plongé. Les maux sur les traits de la sœur, les larmes de la mère rongée par la terreur. Ils perdaient un être cher, par le passé ; et malgré ça, tous les allers retours se concentraient entre cette porte d'entrée et la chambre qui lui était attribué. Il a causé bien trop de souffrance, Kadeuce, par cette quête inutile qui a déjà bien trop causé. « Ya were right, ya know. » Sans pour autant délaisser son iris sur sa présence. Les paroles sont déjà lourdes qu'il peine à énoncer – elle appuie là où tout en vient à se centrer, sur l'endocarde même qui sursaute sous ce que la voix vient de prononcer. « I shouldn't've done that, not like that, not after all of what happened. I wanted so much to make amend about Isy that I forget ya were here. Ya, Ma', Erin... Eunice. » Il tique, réprime ce que le regard aurait à trahir de honte et de culpabilité. Il tient sa place, stoïque, se fermant à tout ce qui fait alors son humanité, ce trop grand cœur que beaucoup ignore sous les côtes malmenées. Rongé par ce que la mémoire ne peut effacer, condamné à cette pénitence qu'il accepte malgré tout sans broncher. « I'm sorry, Cat. » Et les syllabes claquent, comme portées par tout ce qui semblait s’évaporer ; cette force d'antan qui se dévoile brièvement. La raison qui s'allie à la conscience, cette sincérité qui exerce son pouvoir sur ce timbre qui en vient à tout lui confier. Les ressentis, cette nécessité. Ce pardon qu'il lui quémande, sachant pertinemment que rien – jamais – ne sera comme avant ; mais il cherche au moins à tout apaiser. « If I would've listened to ya, we wouldn't be here today. »    
                      

Prunelle peine à s'élever, prunelle lorgne sur les parois froides qu'ils longent. Il s'enfonce au plus profond de ces lieux maudits, droit dans la gueule du loup – avec pour seuls échos ses paroles, la vérité qui pèse sur l'endocarde. Les regrets, la culpabilité ; l'impression de s'y noyer, bouffé par les rapaces qui se moquent de tout ce que le cœur aurait alors à revendiquer. Une force ancienne, une ambition nouvelle. Il l'entend qui s'emballe, il l'entend qui frappe les côtes. Endocarde malmené, compressé, agité. Encéphale fatigué, oppressé, fracassé. La trachée serrée, les toux de plus en plus accentuées. Il a tiqué au silence, il a suivi les pas, il s'est laissé guider jusqu'au nom commun, jusqu'à cette porte qui dégueule la réussite de cette sœur qu'il mène parfois droit aux ombres qui, à lui, lui sont destinées. Coupable, coupable de ternir les rêves qu'elle aurait pu avoir ; parce qu'il ne peut changer, parce qu'il ne reculera devant rien pour parfaire l'unité des quartiers qu'il se doit d'enrichir et veiller. Il l'encaisse, cette clarté qui rayonne des lettres qu'il craint de pourrir. Il l'encaisse jusqu'à s'asphyxier à l'air étrange qui rôde dans le bureau qu'ils ont à déranger. Le regard qui va, vient, s'attarde sur les clichés, sur les souvenirs qui règnent en maître sur l'entièreté de cette pièce. C'est un bref rictus qui pare les lippes, une misérable courbe instinctive qui prend les devants devant les réminiscences d'un temps désormais révolu. Leur frère, le sourire aux pulpeuses. Leur frère, ce qu'il en reste, la mémoire qui doit encore œuvrer pour lui offrir un semblant de réalité. Il est silencieux, le soupir qu'il laisse passer – l'inspiration prise alors tandis que le timbre de la sœur résonne, rappelle les faits. « You lied to me Kad, broke our promise. Il a acquiescé, les traits abaissés. Une moue triste au faciès, l'unique prunelle qui choisit de s'attarder sur les environs plutôt que sur la jeune femme qui dégueule tout ce que le cœur doit faire entendre. Il sait, n'a pas oublié. Il sait, mais une petite voix persiste à lui chanter que cette bataille était sienne, sa faute seule à réparer. But that's not even the worse part. I could have lost you that night. » Il n'a pas osé bouger, figé dans cette position avant que l'étreinte ne soit offerte, les bras refermés sur la silhouette qui s'est approchée. Les mots ont ce poids qui s'impose, un fardeau de plus sur les épaules déjà écrasées. Parce qu'elle a raison, il était prêt à tout donner – il en avait oublié ceux qui vivent encore et souffrent des choix qu'il peut encore acter. Les lèvres sont scellées, les dires qu'il ne parvient pas à formuler. Un pardon de plus dans la longue liste des choses qu'il doit effacer. « You are the only brother I have left, I can't lose you too. Sur les parois du muscle exténué, il y a cette fissure qui vient se dessiner. La voix porte, s'ancre dans l'esprit pour ne plus en être chassée. Ça résonne en murmure, une litanie destinée à l'aider, lui permettre de se relever. I love you dummie. I'm so sorry I reacted that way after. I was... Too much. » Les traits secoués, l'étreinte un peu plus accentuée avant de la briser – à contre cœur, lui qui y cherchait encore un peu de chaleur. Le vide pèse encore, le rien semble parfois se faire plus grand, comme prêt à instaurer un autre malheur. Le souffle diminué, la trachée qu'il tente d'apaiser ; les songes mélangés, les émotions en vortex incessants qui ne cessent de le briser. Il s'est tu, Kadeuce, prenant place sur l'une des assises à sa portée. Le corps las d'avoir à tenir cette hauteur diminuée. « You're okay Kad ? »

L'attention donnée, c'est comme si le masque se fissurait.
L'attention donnée, le brun d'un œil qu'il lève vers celle qui observe.

« What's that ? » Il feint l'incompréhension, mime la surprise sur ses traits fatigués. Porter premier qui s'enfonce contre le dossier, laisse la carcasse révélée quelques cicatrices qui refusent de disparaître – les restes des ambitions stupides et des erreurs indélébiles. « 'Course I am, why not ? » Il a haussé les épaules – souffre des maux qu'il n'ose plus prononcer. La chaleur des flammes qui lèchent encore les chairs, le croit-il. Les larmes sur ses joues qui brûlent jusqu'aux chairs profondes, jusqu'aux muscles atrophiés. L'air maigre aux poumons serrés, prêts pourtant à imploser. C'est comme s'il n'avait jamais quitté cet enfer, comme si une partie de lui était restée sur le sol que l'essence recouvrait. Il sait avoir échoué dans sa connerie – Isidor toujours absent, mort, et l'auteur des souffrances à jouir de la vie, dehors. « Just tired, ya know. I tried to keep holding on to ma old pace but hey, turns out they may be right, I'm just too old for tha' shit. Une possibilité, l'évidence qu'il émet en supposition avant qu'un bref rire n'ait à s'immiscer. I'm kidding here, alright ? I'm fine. » Un mensonge qu'il lui offre, lui qui venait pourtant mettre fin aux tensions et au règne de ses torts. Il l'ose, Kadeuce, pour taire l'inquiétude qu'il n'en peut plus de voir s'ancrer aux prunelles des adorées ; ces femmes qui n'ont plus que lui pour veiller sur tout ce qu'ils ont un jour été, tout ce qu'ils auraient encore à être si l'avenir se réalisait. « Don't worry for ma ass, ya've got so much more to do, right ? » Il désigne les alentours, cette pièce dans laquelle ils viennent de se terrer. Elle a cette mission divine qui se tient à sa portée, la nécessité de parfaire ce pauvre monde dans lequel ils ont encore à errer.