salvatore valente | every hour wounds ; the last one kills.

▬ every hour wounds, the last one kills.
Les effluves de guerre qui s'éparpillent, distillées jusqu'au sommet des mille tours qu'ils se sont appropriés. Elles se sont élevées, flammes infernales qui n'ont rien épargné. Pertes douloureuses qu'ils n'avaient pas envisagé – pas même lui, du haut de sa fierté, de son arrogance, de ce savoir qu'il aime à faire vanter. Pour la première fois depuis longtemps, Salvatore est impassible, silencieux, immuable. Défait par ce qu'il doit encore encaisser, les pleures de ces femmes qu'il en vient à ignorer pour ne pas s'embraser. Colère sourde qui flamboie dans les corridors de son âme, haine trop bien ravivée envers cette vermine qui prospère dans les ruelles oubliées. Il tique, le nez qui se frise et les mains qui se sont mises à trembler. Dieu qu'il voudrait pouvoir tout réparer, des affronts commis à ceux qu'ils se devront désormais d'enterrer. Et, instinctivement, c'est vers son fils que ses songes se sont tournés. Parce qu'il aurait pu être des leurs, de ceux qui n'ont pas eu la chance d'en réchapper. L’œil s'est levé, vers celui que la vie lui a confié, fils qu'il essaie à pleinement élever – parcelle de lui-même qu'il se doit de parfaire pour honorer ce nom dont il a hérité. Il y songe, à ces quelques scénarios qui auraient pu s'imposer et le palpitant se tord, émotion cachée mais bien présente, trop bien ancrée. Elle soulève tout ce qui parvient à se taire quand leur implication n'est pas nécessaire. Pauvre âme tourmentée, pauvre être qui croit la chute trop bien enclenchée. Il en a soupiré, Salvatore. Il a essayé de réfléchir, de chercher une issue à ce qui vient de s'abattre sur cette famille qu'il se devait de protéger – les issues encore inconnues, invisibles à l’œil nu. Douloureuse décision qui lui revient en l'instant, Giovanni destitué par la mort elle-même, de ses griffes trop acérées. Ils ont attendu ses dires, ses belles paroles éternelles qui savaient si aisément tout apaiser. Des cœurs aux essences tremblantes qui peinent en l'instant à se stabiliser. Il a cherché, Valente, ce qui devait être énoncé. Le temps est au deuil, au repos, à la réflexion. Le temps est à la prise de conscience, à la raison. Il a soupiré, plus d'une fois, l'homme vers qui bien des regards s'étaient tournés. Et ils ont acquiescé, ceux-là, la respiration faiblarde sous le choc qui venait de leur être assigné. Ils ont acquiescé, pris de court par tout ce qu'ils n'avaient pas imaginé. Oh, scintillante aube d'une guerre qu'ils ont longuement attendu sans jamais pleinement s'y risquer – par nécessité, pour l'image qu'ils avaient à donner. Grandiose famille qui se doit d'être honorable, qui se doit d'être exemplaire – malgré les vices qui pullulent quand vient la nuit, quand le néant s'impose sur les songes endormis. Il les a laissé se reposer, part du marché honoré, quelques dollars délaissés pour les enterrements de ces fils qui avaient à enterrer. Quant au sien, il l'a guetté, toisé. L'esprit qui s'est égaré, une fois encore, sur tout ce à quoi il a échappé. Ce sont les sanglots qui résonnaient qui l'y ont guidé, à ces hypothèses évitées. Et s'il l'y avait envoyé, s'il s'était risqué à lui confier l'ouverture de ces lieux où désormais bien des fantômes viennent régner ? Que serait-il advenu de cette splendeur qu'il arrive encore à faire valoir ? Que serait-il advenu de cet homme qui prône depuis toujours sagesse, perfidie et savoir ? Cette nuit du onze septembre s’évanouit finalement sans un bruit. Il a laissé son regard se perdre sur l'immensité des lieux désolés, sur les corridors silencieux où seule la Mort semble pouvoir régner. Il a bravé le silence, le calme pesant qui s'était apposé. Il a laissé ses pas se perdre jusqu'à l'immense porte derrière laquelle se dressent désormais ces quelques existences endeuillées, jusqu'à ce sang qu'il partage avec le jeune être qui l'attendait. « Son, now you can see the reality behind all the glorious we try to rise. You must have to never let your guard down. Never. Can you understand that ? » Qu'il sache, celui-là, ô combien ce monde est dangereux, ô combien sa force saura le préserver. « There is strength and temerity. Never dare to confuse them. » Qu'il entende la pleine vérité derrière ce qu'ils s'affairent pourtant à cacher – ils sont les dangers dorés qui flirtent avec l'aube quand résonnent ces cors ensanglantés. À l'image des lueurs chaudes qui gorgeaient les plaines de ses anciennes terres, il y laissera peut-être son âme dans cette volonté à tous les voir brûler.

▬ madness is like gravity.
Répit. Repos concédé, le destin qui desserre de peu son effroyable emprise. Le croyait-il, Salvatore, puisque tout semblait se reconstruire depuis les cendres qui s'étaient éparpillées. Trône délaissé sur lequel une âme est revenue régner. Choix astucieux, silencieux, réfléchit pour ceux qui ne pouvaient errer. Il a suivi, Salvatore. Il a donné son accord, celui-là, pour ce nouveau sentier qu'ils ont désormais à arpenter. Et les choses ont été pressées, calculées au mieux afin que cette glorieuse façade soit imposée. Les masques à porter, jeu parfait qu'ils ont à faire valoir aux yeux naïfs de ceux qui ne pourront qu'en être trompés. C'est sur lui que les regards viendront se poser en ce qui concerne l'énorme bâtiment en laquelle toute leur gloire s'est concentrée. C'est sur lui qu'on compte désormais pour éloigner les attentions, les curiosités qui n'ont que trop traînés – et cette part de responsabilité, il l'a accepté. Vieille âme perfide qui sait comment manipuler jusqu'aux esprits les plus acérés. L'âge, les traits tirés, l'usure en alliés. Prestance qu'il a gardé pour les ombres quand, désormais, la clarté ne contemplera que ses épaules affaissées. C'est un tout autre homme qu'il vient à leur présenter, à eux, aux médias avides de secrets qu'ils ne peuvent encore confier. Lui, le spectre que les ténèbres aimaient à garder, désormais pleinement visible à ceux qui ne l'ont jamais croisé. L'appartenance à cette belle et grande famille jusqu'alors inimaginée, c'est l'avantage qu'ils possèdent désormais – sa fourberie telle qu'elle l'a toujours été. Lui qui, sous les quelques projecteurs qui se sont braqués sur le casino et l'annonce qui y est rattaché, s'est imposé en maître des lieux – quoi que dépassé, iront-ils croire puisque éternellement happés par cette pitoyable cécité. Vieillard qu'il aime à jouer, la fragilité qu'il parvient à feindre pour l'avoir tant côtoyé chez ceux qu'il s'est mis à mépriser. Il sait, Salvatore, il sait comment se jouer des songes qui essaient à se faire intrusifs, ceux-là parfois intolérables pour l'homme qui n'aspire qu'à cette pleine grandeur, cette pleine fierté. Celle qu'il peut, désormais, faire valoir plus qu'il ne l'avait imaginé. Les rennes de ces lieux majestueux qui lui sont confiés puisque ce double-jeu qu'il aime à faire valoir est maîtrisé et lui, lui qui peut y hisser ce fils qui n'aspire qu'à l'y rejoindre, qu'à s'élever. L'ambition partagée, la fierté que de voir son sang réclamer d'être glorifié. Un pas de plus vers le dessein qu'il lui imaginait – l’œil attentif néanmoins quant à la manière dont il viendra s'y ancrer. Il a cru, Valente, que les choses pourraient plus ou moins s'améliorer. Mais elle frappe, cette grande dame encapuchonnée, elle joue encore avec l'essence instable de cette famille recomposée. Deuil qu'elle a rappelé, qu'elle a rajouté aux nombreuses pertes qu'ils ont déjà eu à essuyer. Guerre qui ne fait que s'avancer, qui parvient à faire résonner ses tambours jusqu'en ces rangs à peine reconstitués. Petite âme qui avait survécu au massacre d'un triste onze septembre qu'ils n'ont de cesse à ressasser, envolée. Arrachée, en vérité. Défaite de sa grandeur par les mains souillées de malheureux corbeaux abrutis, avides de témérité – de stupidité. Nouveau coup bas, nouvelle chute qu'ils ont à endiguer. Et lui, lui qui essaie à parer à tout ce qui pourrait venir les trouver, curiosité mal placée qui n'hésitera pas à revenir les trouver. Eux, eux contre qui le sort s'acharne comme dans l'espoir de les briser. S'il savait, celui-là, ô combien ils cachent bien des forces, bien des étincelles qu'ils n'ont pas encore laissé s'embraser. Pour ceux qu'ils n'ont pas su sauver, pour ceux qui tomberont encore puisque les traînés de sang semblent se multiplier ; ils rétabliront l'honneur que ces autres sont venus bafouer. « And those who don't believe in that, we just have to watch them fall. » Depuis ce néant qu'ils aiment à ignorer, Salvatore s'élèvera, saura rappeler la splendeur de cette famille brisée. Manipulateur sans scrupule qui saura réinstaurer la foi en ces endocardes qu'on a déjà trop maltraité. Il y tient, il délaissera toutes ses forces, la majeure partie de sa volonté. Détermination sans faille qui n'a jamais autant brillé qu'en ces temps troublés. Les lueurs ne peuvent disparaître, éternelles qu'elles sont devenues, à l'image des mille magnifiques aurores qui ont encore à s'élever.