kadeuce porter & irene hanson

Une main sur la peau adorée, une main qui veille sur le ventre arrondi, sur cette vie à préserver. Une main sur la femme qu'il craint de voir s'envoler, sur cet avenir qu'il n'a jamais réellement envisagé. Il est ailleurs, le sommeil estompé. On lui refuse le droit au repos, les songes sont emmêlés. Il y a ce vent de terreur qui sifflote, la litanie des mille dangers qui résonne jusqu'en ces lieux sécurisés. Il y a cette peur qui grogne, qui gronde, qui claque à en bousculer l'endocarde exténué. Puis le regard s'éloigne de la magnificence protégée, égaré sur l'heure et les minutes qui persistent à s'écouler. Il est tard, il est encore tôt. Minuit n'a pas encore sonné, mais les lueurs extérieures s'étiolent et devant elles s'imposent les spectres imaginés. Une carcasse sortie de terre, une menace pour ceux devant qui il persiste à s'improviser bouclier. Il a tiqué, Kadeuce, avant que hauteur ne soit prise, avant que le lit ne soit quitté. Il erre dans la demeure refaite et sereine, il s'élance jusqu'à la gamine que Morphée s'est déjà appropriée. Elle dort à poing fermé, elle dort en rêvant à un lendemain aussi ensoleillé que ceux qui se sont terminés. Elle dort avec cette paix qui suinte de ses traits, avec la certitude de pouvoir prospérer - parce qu'il ne cesse de se fatiguer pour qu'aucun mal n'ait à l'approcher. Les approcher. Et pourtant. Il s'est immiscé, drapé d'un cuir méprisé. Il s'abreuve à la folie d'un esprit fracassé, personnifié en un homme que le passé n'a pas su avaler. Il a tiqué, Porter premier, rejoignant le séjour et la pénombre qui peut y régner. Le téléphone qui flirte avec les phalanges, l'instinct qui lui dicte d'appeler l'ami, le frère d'une autre mère que le temps n'a pas fait s'en aller. Il hésite un instant, mais le nom est tout autre qui s'affiche à l'écran ; la femme plutôt que l'homme qui pourrait trop risqué. Il hésite encore, Kadeuce, depuis son canapé où il s'est laissé couler. Il hésite, oui, malgré ces tonalités qui chantonnent, cette respiration qui se dévoile à l'autre bout du téléphone. « If I wake ya, ya can tell me to go fuck maself, I'll understand, alright ? » Un regard sur les vitres, le reflet qui s'impose. Il croit encore l'apercevoir, cette sombre silhouette qui aurait à guetter - le démon que le néant a recraché.